La dernière monoplace autre qu'une F1 qui a tenté de participer à un Grand-Prix. La Dallara 3087 est avant tout construite pour la F3000. Mais la réussite n'a pas été au rendez-vous...
Qui ne connait pas Dallara dans le coin ? Que ça soit en Formule 2, en F3, en Super-Formula, en LMP2, en Indycar ou dans le futur projet de LMDh (avec Cadillac et BMW) et même en F1 (en assistant l’équipe Haas dans la conception des monoplaces), le constructeur italien est présent sur (presque) tous les fronts en sport-auto.
Retournons désormais un peu en arrière : au cours des années 1980, l’entreprise de Giampaolo Dallara se porte plutôt bien après avoir collaboré avec Lancia pour la conception de la LC2 Groupe-C (pour l’endurance) ou encore de la 037 e rallye, la compagnie basée à Parme est également présente en monoplace et plus précisément dans le championnat italien de Formule 3. Toutefois, certaines équipes présentes dans d’autres séries nationales utilisent les châssis conçus par ce constructeur à cette même période, comme en France ou en Allemagne.
Certainement encouragée par les performances de leur machine dans le championnat européen de F3 (qui réunit les teams/pilotes de chaque série nationale et qui se déroulait que sur une seule épreuve en fin d’année), Dallara envisage de s’attaquer à l’antichambre de la F1, à savoir la F3000. Dans une série où les équipes privilégient les châssis March, Lola ou dans une moindre mesure Ralt (et aucune place pour les « artisans »), bon courage pour attirer des clients…Mais peut-être est-ce à la demande également d’une des équipes présente dans ce championnat : Euroventurini, que Dallara s’embarque en F3000…
Notons que Euroventurini est également engagée en F3 Italie, en exploitant des Dallara bien évidemment. Pour la F3000, la structure italienne va faire débuter les nouvelles monoplaces Dallara en 1987. Elle recevra d’ailleurs le soutien technique et humain de la part du constructeur, preuve qu’il y’a bien un partenariat exclusif entre ces deux entités. Euroventurini sera la seule équipe qui engagera des châssis Dallara pour la saison 1987 de F3000.
En ce qui concerne la monoplace, elle se nomme tout simplement Dallara 3087 (référence à la F3000 et à l’année 1987). Celle-ci est de conception classique en réutilisant certainement certaines pièces de F3. Le châssis est monocoque et en fibre de carbone à l’instar des autres monoplaces de la série et la boite de vitesses provient de chez Hewland. Enfin, c’est un moteur Ford-Cosworth V8 « DFV » de 3 litres qui propulsera la voiture. Ce bloc est imposé à toutes les teams en F3000.
Rien d’exceptionnel à tout ça, mais l’ensemble apparait soigné et performant sur le papier. Suffisant toutefois pour faire de l’ombre aux équipes utilisant des March ou des Lola ?
Pendant ce temps chez Euroventurini, on officialise les deux pilotes-titulaires pour cette saison avec le finlandais Jari Nurminen et du vice-champion de la F3 italienne l’an passé, l’italien Marco Apicella.
Pour être honnête, dire que Dallara va d’entrée faire de l’ombre à Lola ou March serait très ambitieux, car les débuts en F3000 seront très difficiles.
Pour résumer la saison, les Dallara de chez Euroventurini ne seront jamais dans le coup. Il est d’ailleurs très rare que son pilote se qualifie au-delà de la 15e position. « Son » pilote oui, car Apicella est le seul à courir la saison entière. Nurminen, lui, quittera l’équipe après trois non-qualifications et une petite 13e place à Vallelunga. L’équipe se concentrera que sur une seule voiture, sauf lors des manches italiennes (Enna-Pergusa, Imola) où la deuxième Dallara 3087 réapparait, pour Guido Dacco et Nicola Tesini.
Pendant ce temps, Marco Apicella ne parvient pas à briller malgré un potentiel intéressant : sa cinquième place à Spa (course interrompue suite à l’accident de Luis Pelez-Sala, seule la moitié des points est attribué) est son seul fait notable. En dehors de ça, le calme plat si on excepte sa non-qualification dans les rues de Birmingham. Un petit point marqué pour ses débuts dans la discipline, dur dur…
En cours de saison, une nouvelle équipe, italienne par hasard, fait ses débuts en F3000 lors de la sixième manche, à Enna-Pergusa. Venant tout droit de la F3 italienne, Forti Corse engage une Dallara 3087 pour le jeune Nicola Larini. Sur les quelques manches auxquelles la structure de Guido Forti s’inscrit, les performances sont modestes, le gap entre la F3 locale et la F3000 est assez importante. Le seul résultat de la part de Forti et de Larini est une 13e place à Birmingham…
Comment expliquer les débuts ratés de Dallara dans l’antichambre de la F1 ? D’accord, ce n’était pas évident de débarquer dans un championnat disons, ultra concurrentiel et où les autres constructeurs se sont bien implantés en s’associant des les meilleures équipes du plateau. Oui, Euroventurini n’est pas une référence en F3000, mais la 3087 n’était pas parfaite non-plus. Si elle n’était pas totalement au point, elle n’a pas progressé de la saison non-plus, pas aidée par l’équipe certes. Le problème principal de cette monoplace est qu’elle est à la fois trop lourde face et imparfaite sur le plan aéro face aux autres F3000, voila un handicap de poids pour le constructeur italien qui doit revoir sa copie pour 1988.
Dans le même temps, une équipe italienne (encore!) ayant sévi en tourisme et en rallye, la BMS Scuderia Italia, s’apprête à débarquer en Formule-1 pour 1988 justement. Mais n’ayant pas les moyens, ni l’expérience de concevoir eux-mêmes leur monoplace, l’écurie basée à Brescia contacte tout simplement Dallara pour leur produire une F1. Le constructeur italien accepte sans hésiter et c’est ainsi que cette dernière fait en quelque sorte, son retour dans la discipline après avoir collaboré avec De Tomaso ou encore Kaushen dans le passé (toutes non fructueuses). Ce sera en réalité une association entre les deux structures pour le programme F1 qui durera cinq saisons.
Cependant, la nouvelle monoplace de F1 ne sera pas prête à temps pour la première course de la saison, au Brésil. Comme manquer un meeting équivaut désormais à une amende, la Scuderia Italia n’a pas d’autre choix que de recycler une autre monoplace. Laquelle ? La 3087 ! Sans aucune modification, pas même le moteur (ça reste un Ford-Cosworth DFV de 3-litres adapté à la F3000, et non le DFZ de 3.5 litres), l’équipe italienne débarque à Jacarepagua avec une machine qui n’aura aucune chance de briller, car bon, la différence entre une F1 et une F3000 est importante…Mais pourquoi pas après tout, il y'a bien eu March/Leyton-House qui a également eu la même idée la saison précédente, au même GP par ailleurs.
Avec plus de 30 participants, une séance de préqualifications est instaurée. Et bien évidemment, c’est la Dallara rouge conduite par Alex Caffi, seul pilote-titulaire pour la saison, qui passe à la trappe. A titre de comparaison, la Rial d’Andrea de Cesaris, lui-aussi présent durant cette séance, est plus rapide de neuf secondes que Caffi. Celui-ci est d’ailleurs crédité d’un temps de 18 secondes plus lent que la McLaren-Honda d’Ayrton Senna, auteur de la pole.
Ce sera l’unique apparition de la 3087 en F1. Dallara, en collaboration également avec l’ingénieur argentin Sergio Rinland, aura fini de construire la véritable monoplace pour cette discipline : la 188. Elle sera prête dès le GP suivant, à Imola.
Et quid de la 3087 ? Eh bien, Dallara est désormais un peu trop occupée avec le programme F1 et à collaborer avec la Scuderia Italia justement. La F3000 semble être laissée totalement de côté.
Toutefois, l’écurie Forti engagera deux châssis dans l’antichambre pour cette même année 1988. Enrico Bertaggia et Fernando Croceri seront les pilotes.
Avec une monoplace qui n’a pas évolué en un an et une équipe qui va entamer sa première saison complète. On ne voit pas trop les Dallara de Forti Corse faire de l’ombre à la concurrence. Ce fut bien le cas : les pilotes collectionnent les non-qualifications en début de saison. Croceri quitte l’équipe après cinq échecs. La concurrence reste toujours aussi féroce, d’autant qu’un nouveau constructeur, Reynard, va vite s’implanter dans le paysage de la F3000 en démodant les châssis March et Lola…
Au milieu de ses six non-qualifications, Bertaggia réussira à se classer 7e à Monza, le meilleur résultat pour toute l’équipe qui ne marquera aucun point de toute l’année. Forti terminera la saison en utilisant des Lola, sans grande réussite non-plus. Ce sera fini des Dallara 3087 en compétition. Elle sera la dernière monoplace ne répondant pas à la réglementation d’une F1 à avoir tenté de participer à un GP.
Fiche technique :
Moteur : Ford Cosworth V8 DFV 2993cc
Aspiration : atmosphérique
Implantation : Central-arrière
Puissance : Environ 400 chevaux
Châssis : monocoque en fibre de carbone
Boite de vitesses : manuelle 5 vitesses, d’origine Hewland
Transmission : propulsion
Pneumatiques : Avon en F3000, Goodyear lors de sa tentative de participation en F1
Liens/sources:
Archives Autosport, Motorsport-Magazine...
STATS F1
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K.N
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