Vous trouvez que Ferrari galère énormément en ce moment ? La marque au cheval cabré a connu pire tout au long de son aventure en F1, à l’instar de la saison 1980 avec cette 312T5.
En 1979, Ferrari remporte le titre es constructeurs tandis que le sud-africain Jody Scheckter est titré chez les pilotes avec l’équipe italienne. La 312T4 (T comme l’implantation de la transmission en transversale) s’est montré fiable et très homogène sur la piste, là où ses rivales manquaient de régularité tout au long de la saison. Cela dit, la monoplace, la première Ferrari comme étant une « wing-car », n’exploite pas suffisamment bien l’effet de sol face aux autres, en partie à cause d’un moteur V12 un peu trop encombrant. Puis, l’arrivée du moteur turbo depuis 1977 avec Renault va bouleverser la donne du côté de Maranello et des autres : dès la fin de la saison, la marque au cheval cabré planche sur la conception d’un nouveau moteur utilisant cette technologie…
En attendant, 1980 se profile et pour certains, ce sera en quelque sorte une saison d’attente. Pour défendre son titre, la future monoplace, conçue sous la direction de l’indéboulonnable Mauro Forghieri, ne devrait pas être une révolution…
La même chose, ou presque
Comparé à sa devancière, la nouvelle monoplace, la 312T5 est en tout point identique à sa devancière. L’aéro a été légèrement retravaillée et a bénéficié d’essais en soufflerie au sein des ateliers de Pininfarina. C’est à peu près tout ce que l’on peut dire coté voiture, et l’exploitation de l’effet de sol reste toujours son talon d’Achille, notamment à cause des caractéristiques de son moteur qui ne permettent pas d'améliorer ceci .
Justement, coté mécanique, pas de surprise : il s’agit toujours d’une boite traditionnelle montée transversalement afin d’optimiser la répartition des masses et la maniabilité. Pour le moteur, c’est le traditionnel V12 à plat (qui a toutefois été revu au niveau des culasses) qui propulsera la 312TS, cette-fois un peu plus puissant et compact. Comme c’est le cas depuis 1978, Michelin fournira les pneus, notamment avec les gommes à carcasse radiale qui étaient efficaces sur la 312T4.
Pour les pilotes, pas de changement également, Jody Scheckter défendra sa couronne tandis que l’intrépide québécois Gilles Villeneuve est toujours de la partie.
Face à une concurrence qui ne compte pas attendre et qui développent encore plus leur « wing-cars », ou leurs monoplaces dotées d’un effet de sol encore plus poussé, on s’attend à une jolie bataille entre Ferrari, Williams, Ligier ou encore Renault.
Sauce rouge pale
Première manche du championnat 1980 de F1 en Argentine, sur le circuit de Buenos-Aires en janvier. Premiers essais et premières déceptions : Villeneuve et Scheckter ne sont que 8e et 11e sur la grille, à deux secondes pleines de la Williams. La course sera un poil meilleure, les 312T5 remonteront progressivement au fil des tours mais le sud-africain voit son moteur couper à dix tours de la fin tandis que son partenaire canadien sortira assez violemment de la piste après une casse de suspension alors qu’il était 3e. Double abandon, peut-être que le prochain GP sera la bonne…
Au Brésil, les Ferrari se comportent mieux : 3e et 7e au départ. Villeneuve pointera même en tête à l’issue du premier tour…avant de plonger dans le classement et de renoncer sur panne mécanique, là ou Scheckter connait à nouveau une panne moteur. Encore un double-abandon en deux courses, la troisième sera la bonne…
Et sur le circuit sud-africain de Kyalami, les Ferrari ne sont pas dans le coup et doivent à nouveau renoncer sur une casse de transmission ou de moteur. Zéro point après trois courses, le bilan en ce début de saison n’est pas bon du tout !
Certes, la 312T5 n’est qu’un modèle intérimaire en attendant la future monoplace à moteur turbocompressé, mais celle-ci peine à jouer les premiers rôles, la voiture n’exploite toujours pas assez l’effet de sol alors que la concurrence a mieux cerné ce phénomène aéro. Autre problème : la monoplace peine à s’adapter aux pneus Michelin, les pilotes éprouvent des difficultés à chauffer rapidement leurs gommes et les usent rapidement en course, il semblerait que d'une part, le manufacturier clermontois était trop focalisé sur Renault, l’autre équipe à utiliser les Michelin et de l'autre, les quelques modifications par rapport à sa devancière font que la 312T5 a une tendance à "rejeter" ces gommes clermontois. Plus problématique, la fiabilité de la Ferrari, point fort durant la saison précédente, a été prise en défaut lors des trois premiers GP.
Revenons aux épreuves et allons sur le circuit de Long-Beach où les 312T5 ne progressent pas. Néanmoins, Scheckter parvient à terminer 5e et donc marquer deux points au championnat. Moins heureux pour Villeneuve qui doit abandonner alors qu’il était en route pour un podium…
Le début des GP européens sera du même acabit : Les 312T5 peinent toujours en qualifs’, mais Villeneuve réussira à terminer 6e à Zolder, puis 5e à Monaco.
A partir de l’été, les résultats vont plonger. Si la 312T5 est désormais fiable, elle ne tient plus du tout le rythme face aux autres, que ça soit sur les circuits rapides ou lents. Une ultime amélioration a été apportée lors du GP d’Angleterre, à Brands-Hatch, sans succès hormis la sixième place de Villeneuve à Hockenheim. Finalement, le développement de cette monoplace est arrêté pour mieux se focaliser sur la future voiture dotée d’un moteur turbo : la 126C.
La saison se poursuit et pas grand-chose de positif à déclarer, même si les nouvelles gommes Michelin rendent la voiture moins rétive en qualifications. Mais souvent, les pilotes échoueront aux portes des points.
Lors du GP d’Italie, sur le circuit d’Imola (oui car Monza n’était pas au calendrier cette-année-là puisqu’en travaux). La nouvelle 126C est présentée durant ce meeting. Gilles Villeneuve la pilote uniquement aux essais et la première monoplace de Ferrari à moteur turbo se montrera véloce, bien qu’elle affiche également une tenue de route médiocre ! Retour en course avec la 312T5 et la routine habituelle hormis le fait que le pilote québécois sort violemment de la piste dans la courbe de Tosa suite à la casse d’une suspension (consécutive au style offensif du pilote pour compenser le manque de performance de sa monture ?), heureusement sans bobo….
Le GP du Canada ? Toujours pas ça : Villeneuve 22e sur la grille et Scheckter non-qualifié. Oui vous avez bien lu : le champion du monde en titre n’a pas pu se placer parmi les 24 premiers sur la piste de Montreal. Pour la première fois depuis 1971, un pilote Ferrari a échoué dans cet exercice…
Heureusement, Villeneuve donnera tout en course pour finir cinquième en course. La dernière manche du championnat, sur le circuit de Watkins-Glen, ne permet pas à la 312T5 de finir en beauté. Loin derrière en qualifs’, Scheckter terminera 11e et dernier, à trois tours de la Williams d’Alan Jones tandis que son partenaire sortira de la route…
Pas de victoire, pas de podium, huit petits points glanés durant la saison et une pauvre 10e place au classement des équipes, pire classement du constructeur dans l’histoire (certes l'écart était très faible entre la 5e et la 10e). Ferrari s’est effondré. Certes, 1980 était une saison de transition mais la marque au cheval cabré a beaucoup trop joué sur la carte de la prudence. Ceci dit, cela n’explique pas pourquoi la 312T5 manquait de fiabilité en début de saison et pourquoi les Michelin ne s’adaptaient toujours avec la voiture, surtout en qualifications. Enfin, il est temps que le moteur turbo arrive car l’ère des "atmo'" touche à sa fin en ce début des années 80.
16e du championnat des pilotes, le vaillant Gilles Viilleneuve restera toujours chez les rouges en 1981. Toutefois, son équipier ne sera plus Jody Scheckter car après cette saison calamiteuse (19e avec deux points, obtenus à Long-Beach) et démotivé, le sud-africain a annoncé durant l’été 1980 abandonner la compétition automobile à l’issue de la saison. A seulement 30 ans, il laisse derrière lui 10 victoires et un titre à son palmarès en Formule 1. Il sera remplacé par le français Didier Pironi.
A partir de l’année suivante, la 126C entre définitivement en piste, mettant également fin à la glorieuse lignée (si on ignore la dernière) des 312T entamée en 1975. C'est également la fin du flat-12 dont ses caractéristiques s'accommodent mal avec l'effet de sol poussé.
Place au moteur turbo et à l’effet de sol prononcé pour le début de cette nouvelle décennie de la F1, malgré les querelles politiques à cette période…
Fiche technique :
Moteur : V12 2990cc
Aspiration : atmosphérique
Implantation : central-arrière
Puissance : Plus de 500 chevaux à 12500 tr/min
Châssis : Monocoque en aluminium et fibre de carbone
Freins : ventilés d’origine Brembo
Boite de vitesses : à 5 vitesses, conçue par Ferrari
Transmission : à l’arrière
Poids : 595 kg
Dimensions : 4,5 m (L) * 2,1 m (l)
Pneumatiques : Michelin
Concepteur : Mauro Forghieri
Résultats en compétition
A participé au championnat de F1 en 1980
10e au classement des constructeurs, 8 points
Pilotes : Jody Scheckter (18e avec 2 points), Gilles Villeneuves (14e avec 6 points)
Cinquième à Long-Beach (GP des USA Ouest), à Monaco et au Canada (Montreal)
Liens/sources :
STATS F1
Fail-Auto est également présent sur Instagram depuis peu ! Vous pouvez visiter ici : https://www.instagram.com/fail_auto/
K.N
Comments