En sport-automobile, les connaisseurs et amateurs connaissent Lada à travers le projet avorté d’une Samara Groupe-B et S ou encore des participations au Paris-Dakar avec des Niva et la Samara Proto. Plus récemment, on se souvient que le constructeur russe a sponsorisé l’équipe Renault / Lotus GP en Formule 1 entre 2010 et 2011 grâce à la présence de Vitaly Petrov au volant et quelques années après, s’engage dans le championnat du monde de tourisme (WTCC) avec des Vesta.
Mais avant 2010, on avait également des Lada engagées en WTCC. D’abord à titre privée, puis sous l’impulsion de la marque elle-même l’année suivante. Petit retour en arrière : on a eu des voitures de la marque, nommée AvtoVAZ dans son pays natal, présentes dans le monde du rallye à partir de l’aube des années 1970 sous les couleurs « officielles » ou en rallycross au début des années 90. Mais précisons les participations à l’étranger provenaient essentiellement des importateurs de la marque, des préparateurs externes et/ou privés. Par exemple, on se souvient des Samara Proto T3 ayant participé au Paris-Dakar qui, bien que soutenues par la marque, sont développées par Oreca, motorisées par Porsche et aidées par l’importateur Jacques Poch. Dans l’ensemble, la marque investissait majoritairement dans la Russie natale, avec les engagements en rallye bien sûr, mais également en fournissant des moteurs dans les championnats de monoplaces (l’équivalent de la F3 et des sortes de Formules Junior) ou en s’impliquant dans les séries de tourisme.
Durant le mois de novembre et décembre 2005, une nouvelle très intéressante apparait : un nouveau constructeur va s’engager en WTCC à partir de la saison 2006 ! Donc, en plus de Seat, Chevrolet, BMW, Alfa-Romeo et dans une certaine mesure Honda (via JAS Motorsport), on aura Lada qui s’invite à la fête pour la deuxième année d’existence de ce championnat (si on omet 1987). Ça correspond justement à une période où Lada s’implique encore plus en compétition, que ça soit à une échelle locale ou mondiale en plus de produire quelques concepts et machines originales.
Sachant que le constructeur n’a pas l’expérience dans ce championnat et encore moins les gros moyens, il a été décidé de s’associer avec la structure allemande MTEC Sport (ne pas confondre avec MTEK, équipe néerlandaise qui était fidèle avec BMW) et celle-ci forme avec Lada Motorsport une équipe d’usine basée à Waldsolms (dans la Hesse) et nommée Lada Sport.
Le développement de la future machine répondant à la réglementation de l’époque, celle des S2000, a commencé courant 2005. La base est rapidement trouvée, il s’agit de 110 (ou VAZ 2110). Mais si, vous aviez certainement vu ou croisé cette berline compacte désuète commercialisée en 1995 et qui ne présente que peu d’originalité…Et bien, celle-ci a également eu plusieurs déclinaisons pour la compétition. Commençons par la Kit-Car 2l développée par Motorsport Developments (MSD, la même qui s’occupait du programme de Hyundai au championnat du monde des rallyes, que ça soit avec la Coupé Kit-Car et l’Accent WRC). Ensuite, la 112 (ou 2112, la version à 5-portes) voit le jour dans les années 2000, toujours pour le rallye et répondant au règlement des S1600 où MTEC était déjà impliquée dans l’histoire. Enfin, il existait déjà des 110 évoluant dans des championnats de tourisme à la fin des années 1990, du moins en Russie essentiellement. Que ça soit celle ayant couru dans la série de Supertourisme locale ou dans la coupe monomarque, les 110 étaient assez nombreuses sur la grille de départ…
Et notre 110 destinée à rouler dans le peloton du WTCC ? La voiture est présentée au cours du mois de novembre 2005 au salon de Moscou et comparée à la version civile, celle-ci est plus séduisante esthétiquement parlant bien que sa carrosserie revue fait un peu « tuning » de loin…
En fait, la voiture reprend la version musclée de la 110, à savoir la VAZ 21106. Apparue en 1997 et produite à environ 350 exemplaires selon les sources, la berline 4-portes a d’ailleurs son kit aéro déjà présent d’origine et sous le capot, on trouve un 2-litres provenant de chez Opel ! Cette version sportive servait initialement de « base » pour la version Kit-Car et les autres modèles de course. Pour la 110 WTCC, on reprend le même moteur et on confie toute la préparation à MTEC Sport qui construira trois voitures. Les ambitions sont grandes pour Lada qui va engager deux 110 pour leur première année et qui envisage également d’autres projets, comme la 112 Rallye à quatre roues motrices et certainement d’autres…
La carrosserie d’origine dévoilée à Moscou, fera l’objet de nouvelles modifications durant l’hiver, notamment en ce qui concerne le spoiler avant ou les passages de roue. Hormis ceci, les nouvelles se font rares à partir de janvier 2006, comme si on ne voulait rien révéler d’autre à propos de la 110 WTCC. Chez Lada, il y’a eu dans le même temps des changements internes, mais rien qui bouleverserait les plans dans le championnat. Malgré tout, il n’y a toujours pas grand-chose à se mettre sous la dent coté informations et les très rares photos montrant les Lada en action ont littéralement disparu du web…
D’ailleurs, ces dernières sont absente pour le premier meeting de l’année 2006, sur le circuit italien de Monza. Et on ne verra jamais Lada durant toute la saison. Faute d’obtenir des moyens suffisants et de sponsors, le programme est abandonné (ainsi que d’autres projets) sans que les voitures aient pu courir en compétition.
Après ceci, on pense que les voitures sont définitivement rangées dans une cave ou enfouies discrètement chez Lada…Mais surprise à la fin de l’année 2007 ! On apprend que ces 110 vont disputer la saison 2008 de WTCC. Et ce n’est pas une blague : une équipe russe nommée Russian Bears Motorsport va engager deux voitures durant toute l’année ! Et effectivement, cette structure crée cette année-même (et ayant déjà participé à quelques manches en début de saison de WTCC avec une BMW 320) récupère deux châssis et les prépare elle-même ces dernières.
Bien que Lada ne soit pas impliquée de manière officielle dans ce nouveau programme, celle-ci soutient malgré tout la petite équipe basée à Franeken (Pays-Bas) sur le plan technique. Pour nos 110, étant donné que la réglementation S2000 n’a pas évolué, les modifications seront assez limitées. L’aéro a été une fois encore retouchée et la préparation du moteur 2-litres Opel est confiée aux britanniques de chez Swindon Engines (et non Spiess Motorsports comme certaines sources l’affirment), les mêmes qui sont impliqués dans ceux qui propulsent les Chevrolet dans ce championnat. La puissance se situe entre 270ch et 280ch (les sources divergent à ce sujet) tandis que la boite de vitesses séquentielle provient de chez Hewland. Unique fournisseur en WTCC, les 110 seront équipées de pneus Yokohama.
Propriétaire du team, Viktor Shapovalov sera derrière le volant de la première 110. Il sera épaulé par le néerlandais Jaap Van Lagen qui vient de la Porsche Supercup. Le duo n’est pas le plus performant sur le papier et loin d’être expérimenté parmi le peloton WTCC, et le Russian Bears Motorsport débute également dans ce championnat à plein-temps. Notons également que les pilotes et l’équipes sont inscrites dans la coupe des indépendants, nommée la Yokohama Trophy, et on ne compte pas moins d’une dizaine de pilotes qui font la saison presque complète.
Les 110 ne sont pas encore prêtes pour le début de saison 2008. Et les premiers véritables roulages furent tout, sauf exceptionnels. Malgré tout, il faudra être présent en mai pour le troisième meeting de la saison, sur le circuit espagnol de Valence, qui correspondait aux troisième et quatrième manche de l’année (chaque meeting est divisé en deux courses). Et déjà, le premier souci apparait. Après vérifications techniques de la FIA, il s’avère que la Lada 110 ne sont pas tout à fait conformes en ce qui concerne la culasse et le conduit d’air sous le capot ! Après discussions et accord des autres équipes, les voitures peuvent tout de même participer aux courses, mais ne marqueront pas de points, que ça soit au classement général ou du côté des indépendants.
De toutes manières, les 110 ne sont pas du tout dans le coup et rendent près de cinq secondes aux meilleures voitures. Pour la toute première course, Van Lagen abandonne après une grosse boucle, victime de sa transmission tandis que Shapovalov finit vingtième et dernier classé. C’est encore moins glorieux pour la course suivante puisque les deux Lada ne verront pas l’arrivée, à cause d’un accident dans le peloton et d’une nouvelle casse de transmission.
Présentes dans les rues de Pau (où Shapovalov échoue à se qualifier, faute de chrono suffisant, à pratiquement sept secondes de la pole) et à Brno avec des voitures toujours non-réglementaires, ces 110 le seront enfin à partir d’Estoril quand Lada et l’équipe réussissent à la faire homologuer sans aucun souci. Sur le tracé portugais, rien de nouveau sous le soleil, mais Van Lagen termine quinzième lors de la première manche et troisième parmi les indépendants, ce qui constitue le meilleur résultat d’une Lada 110 cette année.
Une troisième voiture sera engagée à partir du neuvième meeting, à Imola. Et ce sera Kirill Ladygin, pilote-essayeur de Lada, qui sera derrière le volant. Les performances ne s’améliorent pas, la 110 est sous-motorisée face aux autres WTCC qui développent près de 300 chevaux, et son comportement sur la piste est loin d’être irréprochable. Bref, la berline russe est à la traine dans tous les domaines…
A la fin de la saison, et alors que Van Lagen termine septième au classement des indépendants et ses deux partenaires non-classés, on apprend que Lada va officiellement s’impliquer dans le programme à partir de 2009. Et cette-fois, le constructeur sera bel et bien présent en s’appuyant sur le Russian Bears Motorsport comme partenaire. Cerise sur le gâteau, un nouveau modèle destiné à remplacer la 110 est en chantier. Elle apparaitra en cours de saison prochaine.
La 110 WTCC n’est pas pour autant délaissé. L’aérodynamique a été une fois encore revue et le moteur gagne de la puissance. Enfin, les pilotes pour cette nouvelle année sont les mêmes qu’en 2008. Pour la structure désormais nommée Lada Sport, il faut s’accrocher et essayer de ne pas être trop largué pendant la première partie de l’année en attendant la remplaçante de la bonne vieille berline compacte…
Désormais inscrites en tant que constructeur à part entière, les trois Lada tirent toujours la langue face à la concurrence. Il y’a certes des petits progrès, mais ça reste clairement insuffisant en termes de compétitivité et la puissance du moteur reste encore en dessous de la concurrence. Seul point positif, la fiabilité semble plus que bonne.
Aucun des pilotes réussiront à inscrire le moindre point (seuls les huit premiers le peuvent). A Valence, le moteur gagne à nouveau des chevaux pour s’approcher des 300ch, sans succès. Et ces blocs améliorés cassent à deux reprises pendant les deux courses de la manche espagnole, dont celui de Van Lagen et de Ladygin.
A Porto, septième manche de la saison, la nouvelle Lada débarque enfin sur la piste. Cette nouvelle berline compacte, la Priora, est uniquement réservée au tout nouveau pilote de l’équipe Lada. Il s’agit du britannique James Thompson, lui-même champion en BTCC et solide animateur dans le peloton du WTCC. Van Lagen et Ladygin se contenteront encore de la 110 sur le circuit portugais et à Brands-Hatch avant que ces derniers (en plus de Shapovalov qui ne fera qu’une seule apparition par la suite, préférant prendre du recul pour rester derrière le muret des stands) obtiennent enfin leur nouvelle machine lors de la manche allemande, sur l’Oschersleben. La 110 de compétition peut enfin prendre sa retraite, pratiquement deux ans après que le modèle de série ne soit plus commercialisé chez nous.
Fiche technique
Moteur: 4-cylindres en ligne 1998cc d'origine Opel
Position: à l'avant
Puissance: De 270ch à près de 300ch (selon les évolutions) à 8500 tr/min
Chassis: basée sur la 110 de série, et plus précisément sur la version 21110
Boite de vitesses: séquentielle six rapports
Transmission: à l'avant
Poids: 1140 kg (minimum, sans lest)
Dimensions: 4,42m (L) * 2,54m (l)
Pneus: Yokohama
Liens & sources:
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