Lamborghini présente à l'époque du Groupe-C ? Ca a été brièvement le cas en tant que constructeur et motoriste...même si le projet n'avait rien d'officiel.
Bien avant que Lamborghini soit actuellement présente de manière assidue avec les Hurracan (version Trofeo ou GT3) et la future SC63 LMDh, la marque italienne n’a jamais été intéressée par la compétition automobile à sa création. Oui, il y’avait eu des Miura ou des Urraco engagées à titre privé qui ont participé de temps à autre à des épreuves, sans résultat notable. Une 400GT a même tenté de prendre le départ des 24h du Mans en 1975, mais elle échouera à se qualifier. Au début des années 1980, l’histoire se répète. Il faut également dire que la situation financière de Lamborghini n’était pas flamboyante et la faible production des voitures de série (qui se résumait à la Countach et à la Jalpa en 1984) aurait rencontré des soucis d’homologation…
Et puis un beau jour durant l’année 1985, une personne a l’idée d’engager une Lamborghini dans les grandes épreuves d’endurance. Il s’agit d’un concessionnaire anglais au nom de David Jolliffe. Celui-ci dirige Portman, concession important les autos italiennes (et donc Lamborghini) et pense tout de suite à la Countach comme base de voiture de course homologable en Groupe-B. Mais la faible production à l’année de cette dernière et le fait que les Groupe-C sont uniquement les bienvenues en endurance refroidissent les ambitions de Jolliffe. Pas grave toutefois, on va donc construire une machine qui répond à la réglementation en vigueur à l’époque ! Reste à trouver des partenaires techniques et financiers car Lamborghini ne sera aucunement impliquée dans l’affaire…
Qui dit Groupe-C dit forcément un prototype inédit et qui ne partage presque rien avec les modèles de série. Mais il faut que ça soit une Lamborghini, même si elle reste une sport-proto typique des voitures de la catégorie comme la Porsche 956 (et 962) ou la Lancia LC6. Pour le moteur, il proviendra bien évidemment de la marque au taureau. Cette dernière a accepté de fournir les blocs à Jolliffe pour son projet qui devrait débuter en compétition à partir de 1986. Encore mieux, l’ingénieur de la marque, Luigi Marmiroli, prete main forte à l’équipe pour améliorer et adapter le moteur sur la piste. Il a également été aidé par un aute ingénieur, Giulio Alfieri qui a conçu en son temps, plusieurs moteurs vus chez Maserati.
Tradition du constructeur, il s’agit d’un bon gros V12 atmo venant de la Countach LP5000. Mais des 5,1 litres de base, on passe à 5,7l et la puissance maximale tourne autour des 700 chevaux ! A la place es carburateurs on a installé un système d’injection électrique.
Pour l’histoire et afin de rendre le moteur performant sur la piste, les ingénieurs se sont inspirés des mêmes blocs V12 qui propulsent…les offshore. Oui, si Lambo ne s’intéressait pas au sport-auto, la marque alors dirigée par les frères Patrick et Jean-Claude Mirman se sont davantage intéressés pour les courses de bateaux, ou plutôt des sortes de dragsters sur mer. On rigole quelque peu, mais pourtant, ces V12 de plus de 7 litres, voire 9 ( !!!), propulsaient avec succès des bateaux de course à cette époque et cela se poursuivra encore pour les décennies suivantes. Et si vous pensiez que tout ceci est terminé, dites-vous bien que certains jolies bateaux et yachts ostentatoires sont équipés de blocs Lamborghini aujourd’hui même.
Concernant la voiture, ce n’est pas Jolliffe qui l’a réalisé lui-même bien sûr. Jouant sur ses relations, il va contacter Spice Engineering pour le développement du châssis. Le constructeur de voitures de course et écurie anglaise présente en endurance va récupérer une Tiga GC85 qui servira de base. Outre le fait que cette Groupe-C n’est pas une création de chez Spice (En fait, avant de construire leurs propres chassis à partir de 1986, elle utilisait des Tiga), c’est également un proto qui court dans la division , inférieure du championnat du monde de sport-prototype/endurance, la catégorie C2 qui correspondait (toutes proportions gardées) à ce qui est l’actuelle LMP2. En peu de temps, quelques modifications sont apportées. La partie arrière a été retravaillé et élargie pour accueillir le V12, l’aéro a été affinée et les portières sont inédites. Pour le reste, la boite de vitesses provient de chez Hewland, la carrosserie alterne à la fois le kevlar, la fibre de carbone et la fibre de verre. Enfin, de nombreuses prises d’air et d’ouvertures sont présentes sur la machine. Avec tout ceci, le poids est de 850 kilos, dans la moyenne de toutes les autres Groupe-C de l’époque.
Le proto est présenté au public pour la première fois en début d’année 1986 à Monaco. Cette voiture se nomme Countach QVX et cette Lamborghini (bien que la marque ne soit aucunement impliquée) n'a évidemment aucun lien avec la Countach civile sinon le V12 et les phares arrière. L’ensemble de la voiture apparait bien soigné bien que celle-ci apparait également classique dans sa conception. On note également que Jolliffe a trouvé un sponsor avec Unipart et Goodyear fournira les pneumatiques.
Pour les pilotes, ce seront Tiff Needell et Mauro Baldi qui auront la mission de faire briller cette voiture sur les circuits. Enfin, Jolliffe confie l’exploitation et l’engagement de la QVX au CC Racing, écurie fondée par David Cook et Peter Clark, mais il convient de noter qu’elle sera engagée sous le nom de la concession de Jolliffe : Portman Racing. Tout est prêt pour participer au championnat du monde de sport-protos cette saison (incluant les 24h du Mans).
Sauf qu’après quelques tests effectués, le budget est plus que réduit. Il faut dire qu’hormis Unipart, il n’y a aucun autre annonceur sur les flancs de la QVX. Ce sera d’ailleurs la raison principale de sa non-présence aux 1000km de Monza en avril, manche d’ouverture du championnat. L’histoire se répète pour les épreuves suivantes et malgré des essais effectués en Grande-Bretagne, on se demande si la voiture et l’équipe vont réellement débuter cette année…
Il faudra attendre le mois de novembre pour enfin la voir courir. Présente aux 500km de Kyalami qui se déroulait hors-championnat, seul Tiff Needell sera au volant sur cette épreuve divisée en deux courses de même distance (250km + 250 = 500km) et la concurrence dans la catégorie principale (C1) est plutôt intéressante avec la présence de plusieurs Porsche 956/ 962 de chez Joest, Kremer, Brun ou du John Fitzpatrick Racing, une Rondeau, une Tiga ou encore une Zakspeed C1/8.
La QVX n’est pas tout à fait au point, ce qui est normal vu qu’elle débute en compétition. Il faut noter que les pneus sont désormais des Dunlop et que la tenue de route n’est pas extraordinaire. Needell arrachera le 7e chrono à près de 6 secondes de la Porsche de chez Brun. La première course se passe sans histoires, le pilote anglais finira 7e à trois tours. La seconde sera meilleure : 5e à l’arrivée.
Tout n’est pas parfait, mais la QVX a un certain potentiel si le budget suit. Mais le problème n’est toujours pas résolu et bien que Jolliffe espère participer aux épreuves du championnat du monde en 1987, on ne reverra plus jamais ce proto en compétition et le programme s’arrêtera définitivement par la suite. Dommage !
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