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Photo du rédacteurGoodstone

L’aventure Midland en F1

Dernière mise à jour : 28 févr. 2021

Fin-2005, l’équipe Jordan est définitivement morte et enterrée. Place à un nouveau nom et à une nouvelle aventure…qui n’aura pas duré bien longtemps.


Une écurie russe en Formule 1 ? C’était une possibilité lorsqu’un homme d’affaires, leader de Midland Group, une société d’investissement et de commerce dans le domaine de l’immobilier, industriel, entre autres, et oligarque Alex Shnaider s’intéresse de près à la catégorie-reine du sport-auto. Choix curieux tant le bonhomme en question n’a jamais foulé les paddocks de la F1, mais pourquoi pas après tout hein, si il veut surtout faire la promotion de sa boite, c’est son droit, d’autant qu’il n’est pas le premier ni le dernier à faire cela, Benetton ou Red-Bull peuvent en témoigner…

Alex Shnaider en discussion avec Bernie (©LAT Images)

C’est durant l’automne 2004 qu’on apprend que l’homme d’affaires russo-canadien veut bâtir sa propre structure qui doit débuter pour 2006. Avec des moyens considérables, Shnaider est dans le top-20 des personnes les plus fortunées au Canada à cette période (selon Forbes), il va contacter Dallara pour la fourniture des châssis. Ensuite, il s’entoure de plusieurs personnes qui sont dans le monde du sport-auto, à commencer par Colin Kolles, qui dirige une team en Formule 3 Euroseries, puis avec Trevor Carlin, fondateur de sa propre structure dans les formules de promotion et manager à succès dans ces catégories. A 36 ans et dirigeant d’une grosse société, voilà Alex Shnaider propriétaire d’une équipe de F1…


Pendant ce temps, l’équipe Jordan est dans la mouise : après une saison 2004 aussi catastrophique que 2003 (voit article consacré à l’EJ13), la structure chère à Eddie Jordan n’a plus d’argent, plus d’amis ni de Curly, plus de moteur et cherche désespérément un investisseur pour survivre.

Encore une saison de galère pour Jordan...

Ça tombe bien, à la fin du mois de janvier 2005, Midland va racheter Jordan. Choix pas illogique puisque reprendre une team déjà existante est moins couteux que de créer une toute nouvelle structure. Notez que ce rachat est en partie facilitée par le coup de pouce de Bernie Ecclestone, le big-boss de la F1, quelle surprise…


Dernière saison sous le nom de Jordan

Comme l’annonce a été faite tardivement, à moins de deux mois du début de saison, le nouveau proprio’ ne peut qu’accepter que 2005 sera une saison de transition et garde le nom de Jordan Grand-Prix pour des raisons commerciales. Au moins l’homme d’affaires n’aura pas trop à investir pour cette saison.

L’équipe est dévoilée fin-février à Moscou, sur la Place Rouge. C’est également l’occasion de présenter les deux pilotes choisis : le portugais Tiago Monteiro et l’Indien Narain Kathikeyan. Inutile de préciser qu’ils vont débuter en F1 et qu’ils apportent un peu de sous, l’inverse aurait été étonnant sinon. Présentée plus tard pendant les essais, la Jordan EJ15 est une simple évolution de ses médiocres devancières. Il n’y aura rien à espérer donc coté performances. La principale nouveauté est le moteur Toyota, dont Eddie Jordan a conclu un accord avec le constructeur nippon avant le rachat par Midland.

Vu comment le public est habillé, nul doute que les pilotes cherchent un blouson pour se réchauffer un peu... (©Sutton Images)

Coté organigramme, Colin Kolles est nommé directeur général du team tandis que Carlin est le directeur sportif. Deux haut-gradés qui ont un rôle à peu près similaire, quelque chose me dit que ça va mal se terminer…

Comme attendu, l’équipe se bat dans le ventre mou du peloton avec Minardi. Au moins, la machine se montre fiable à défaut d’être une fusée, c’est déjà ça de pris. Notons quand même la magnifique troisième place de Monteiro lors du « fameux » GP des USA, à Indianapolis (six voitures au départ…) ou encore de la huitième place du pilote portugais à Spa, cette-fois après une solide performance sous la pluie.



L’équipe se classera 9eme (sur 10) parmi les équipes engagées, avec 13 points marqués. Fin de l’aventure Jordan Grand-Prix, place aux vrais débuts de Midland F1 Racing (MF1).


F1 russe !


Durant l’année 2005, il faut noter que Trevor Carlin a déjà quitté l’équipe en course de saison, visiblement en désaccord avec le team et Colin Kolles. Quand je vous disais que ça allait forcément partir en cacahuètes sur ce cas.

Partons pour l’année suivante. Pour la première de Midland dans l’élite, Monteiro et le néerlandais Christijan Albers sont les pilotes pour cette saison. Coté pilote-essayeurs, Adrian Sutil, Girgio Mondini, Roman Rusinov et Markus Winkelhock sont choisis. Oui, cinq pilotes, c’est beaucoup. D’accord, tous apportent un peu de budget et de sponsor pour pouvoir faire quelques tours de manège durant les séances d’essai du vendredi, mais quand même…


C’est en février que la première F1 russe (ou presque) est présentée au public : La Midland M16, aucun lien avec le fusil mitrailleur, est en réalité une Jordan EJ15B retravaillée par l’ingénieur James Key. Sous le capot, c’est un V8 Toyota qui propulsera la machine. Enfin, Bridgestone fournira les pneus.


Durant l’hiver, pas mal de sponsors vont décorer la M16. Voici une liste non-exhaustive de ces arrivants : JVC, LB Icon, Rhino’s, F1Racing Magazine, Mingya.cn, Superfund, Europoker, Liqui-Moly…Dans le même temps, Midland recrute l’ancien pilote Johnny Herbert, pas pour un poste d’essayeur, mais pour un rôle de directeur des relations sportives.

Malgré toutes ces annonces, les moyens techniques et humains sont encore trop justes. Il sera intéressant de voir si Alex Shnaider va massivement investir dans ce qui est désormais son équipe, même si ce n’est pas vraiment dans la tête du big-boss…

Devinez qui est au volant? Hé oui, le pilote de moto, Max Biaggi, s'est offert quelques tours de piste durant les essais hivernaux. Certaines sources affirmaient meme qu'il allait vraiment courir, improbable! (Crash.net)


Nouveau nom, même galère


Vu les modestes performances de la M16 durant les essais hivernaux, on ne s’attendait à pas grand-chose pour Midland cette saison, et ce fut le cas : Monteiro et Albers se traînent dans le ventre mou du peloton. Seule Super-Aguri, avec leurs vieilles Arrows de 2002 légèrement remaquillées, est derrière l’équipe anglo-russe (car basée à Silverstone). Pas grand-chose à dire pour la première partie de la saison, hormis le fait qu’Albers a réalisé une solide performance artistique à Imola, bien aidé il est vrai par Yuji Ide…


Plus de peur que de mal (©FIA)

Le mois de mai commence à peine et des rumeurs sur une éventuelle vente de l’équipe apparaissent. Comme c’était prévisible, Shnaider n’investit que modestement (vu d’où elle est parti, bon courage pour dépenser à bloc afin d’être un minimum compétitif…), et la M16 ne subira que très peu de développements durant cette période, au grand dam des pilotes.

En piste, aucun changement n’est à constater, Monteiro aurait pu marquer un ou deux points à Indianapolis après un carton éliminant la moitié du peloton lors du premier tour. Mais la Super-Aguri de Sato passa par la…

Encore une Super-Aguri qui vient harponner une Midland ! (®LAT)

Pourtant, l’été marque les premières vraies évolutions da la monoplace : aéro retouchée et suspensions avant améliorées. Albers en tirera meilleur parti en se hissant parfois en deuxième partie des qualifications (Q2), et donc, à se qualifier vers la 15e et la 16e place. Vu comme ça, c’est pas grand-chose, mais la M16 peut enfin titiller les Toro-Rosso ou même les Red-Bull. Toutefois, la fiabilité de la voiture, point fort de la Jordan EJ15, est perfectible, en grande partie due au V8 Toyota. A plusieurs reprises, Albers est victime d’un souci avec le moteur lors des essais, gâchant ses belles performances en qualifs’ en étant pénalisé pour changement de moteur.

Regardez-moi tous ces sponsors, une vraie guirlande de noël, cette Midland M16!

En course, rien à signaler, sinon que les M16 terminaient respectivement 9e et 10e sous la pluie à Budapest malgré des Bridgestone peu efficaces sur le mouillé. Dommage que seuls les 8 premiers marquent des points…


Уже конец приключения!


Alors qu’on s’approche de la fin de saison, on apprend durant le GP d’Italie que Midland est racheté par Spyker Cars et un consortium d’investisseurs néerlandais pour une somme dépassant les 100 millions de dollars. Le rachat est effectif le 30 septembre. D’ici-là, adieu Midland et bonjour au petit constructeur batave dès les trois derniers GP (Chine, Japon et Brésil), même si le nom de l’équipe garde le nom de Midland F1 Team pour la fin de la saison 2006 de F1 (en réalité Spyker-MF1 sur les papiers officiels).

On peut résumer l'aventure Midland par cette image, d'un point de vue sportif (©?)

Pour terminer avec cette brève histoire, Midland n’a pas marqué de points durant la saison. A défaut d’avoir vu son équipe briller sur la piste malgré des petits progrès course après course, on peut dire qu’Alex Shnaider n’a rien perdu dans cette histoire en rachetant une structure moribonde, puis en faisant de la pub pour sa société sans non plus trop investir, le tout en revendant Midland F1 Team pour une belle somme, un modèle à suivre ! Si vous aussi, vous êtes fortuné, que vous êtes en mal de publicité et que vous aimez la Formule 1, rachetez une modeste structure, faites quelques maigres investissements et patientez quelques années avant de surement décrocher le jackpot en refourguant le tout à un autre pigeon repreneur.

Shanghai 2006: Exit Midland (sauf sur les papiers officiels) et bienvenue à Spyker. La société Midland quant à elle, existe encore aujourd'hui (©?)

Liens/ sources :


F1i Magazine, bilan de la saison 2006.

Archives Crash.net, Grandprix.com & Autosport.

Nouveau nom pour l'ex écurie Jordan en 2007: Spyker, cette-fois Midland disparaît définitivement du radar.. (©classic F1 Cars)

K.N

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