Que faire quand on a pas réussi à marquer de point la où votre partenaire récoltera plus d'une trentaine avec la même voiture?
Kazuki Nakajima n’a pas laissé un souvenir impérissable en Formule-1 tant sa présence dans la catégorie-reine du sport-auto a été brève (deux saisons complètes, plus une pige fin-2007 au Brésil) et ses résultats n’ont pas été flamboyants. N’empêche, le pilote japonais, fidèle à Toyota, aura eu une carrière plus qu’honorable par la suite, que ça soit en Super-GT, en Super Formula et surtout, en endurance.
Revenons en arrière, celui qui a récemment quitté le WEC pour devenir vice-président de Toyota Gazoo Racing n’a connu qu’une équipe lors de son parcours en F1 : Williams. L’équipe britannique, qui n’était déjà plus ne référence au milieu-fin des années 2000, était motorisée par Toyota et il était presque évident de voir une figure nippone au sein de la structure de Sir Franck Williams. Lors du dernier GP de la saison 2007, il prend la place d’Alexander Wurz à Interlagos et finit 10e.
Grace à Toyota et à ses résultats honorables en GP2 (3e avec DAMS), Kazuki est nommé pilote-titulaire chez Williams en 2008. Avec Nico Rosberg comme partenaire, il va falloir d’entrée hausser son niveau de jeu face à un jeune allemand plus qu’ambitieux.
Pour sa première saison complète, Nakajima s’est bien débrouillé au volant d’une monoplace pas très compétitive (sauf sur les tracés urbains). Certes, il a montré des lacunes en qualifications (il n’a devancé que 4 fois Rosberg sur ce point) et se montrait de temps en temps « chaud bouillant » dans le peloton, mais en dehors de ceci, peu d’erreurs et une capacité à profiter des conditions de course difficiles pour grapiller des points.
Après ceci, le pilote nippon est reconduit dans ses fonctions, et l’année suivante réservera de gros changements en termes de règlements : place à des monoplaces plus « simples » en termes d’aérodynamique a et moins d’appui, retour des pneus slick, ailerons plus étroits ou encore introduction du KERS (ou système de récupération d’énergie) …Tous ces changements vont bouleverser le peloton de la Formule 1…
Revenons à nos moutons, la Williams FW31 propulsée par le V8 Toyota est une monoplace globalement compétitive et Rosberg le prouvera à plusieurs reprises, même si la malchance s’en mêle un peu…et qu’il manque lui-même certaines grosses opportunités. Pour son partenaire nippon en revanche, rien ne se passait comme prévu durant toute la saison…
Premier GP de l’année à Melbourne : qualifié 12e, Nakajima remonte jusqu’à la 5e place avant de taper le mur et de renoncer. Première grosse occasion manquée. La suite ne sera pas meilleure, anonyme 12e à Sepang après un départ mou et abandon à Shanghai ainsi qu’à Bahrein pour des pépins mécaniques (sans compter le fait qu’il s’est accroché avec les BMW dans le désert bahreïni). Trois abandons en quatre courses, pas vraiment à son avantage dans l’exercice des qualifications et de la casse, il va falloir se reprendre…
Le premier meeting européen, sur le circuit de Barcelone, sera dans la continuité du début de saison : aucun résultat positif notable avec une anonyme 13e position en course après avoir endommagé son aileron avant lors de la cohue après le premier tour. Enfin quelque chose de positif dans les rues de Monaco où il accède pour la première fois de la saison en Q3 et se place 10e sur la grille. Il pouvait légitimement viser le point de la 8e si l’équipe ne l’avait pas fait arrêter tôt en piste, ce qui fait que Nakajima restera englué dans le trafic durant le reste de l’épreuve…et sortira à Mirabeau à deux tours de la fin…
Zappons sa prestation anonyme en Turquie (bien aidé par un arrêt au stand très long) pour évoquer sa superbe qualification à Silverstone : 5e. C’est d’ailleurs l’unique fois que le japonais devance Rosberg en qualifs cette année-là. Trop beau pour être vrai : partant en réalité avec peu de carburant, il est le premier à s’arrêter aux stands…et n’arrivera pas à sortir du trafic. Il doit se contenter d’une 11e place finale…
La période estivale sera terrible pour le protégé de Toyota, aucune amélioration n’a été constatée en qualifs comme en course. De plus, celui-ci reste assez souvent impliqué dans les petites touchettes au départ ou dans le peloton, ce qui lui plombe d’entrée ses courses. Autre souci, des difficultés à remonter dans le peloton ou à se montrer « agressif » dans les moments-clés. Son meilleur résultat en course durant cette période est une 9e place à Budapest, loin derrière Rosberg (4e)…
Bien évidemment, son manque de résultats crée quelques rumeurs sur le fait qu’il terminera la saison ou non chez Williams, ou tout simplement s’il ne disputerait pas sa dernière saison en F1. Quelques rumeurs disons, fantaisistes, l’enverraient chez Toyota. Après tout, depuis le temps que le constructeur nippon rêvait de placer l’un de ses « poulains »…Sachez que pour l’information, son cas faisait quelque peu jaser dans les forums de F1, moins que celui de Nelsinho Piquet, mais quand même…
La fin de l’été sera un tout petit peu meilleure pour Nakajima, mais c’est également à ce moment où la Williams stagne quelque peu en termes de performances. Il égale son meilleur résultat dans les rues de Singapour, course où il aurait pu, voire du, marquer des points.
Après ça, Kazuki va connaitre une course pénible chez lui, à Suzuka : devant son père et son frère, il était totalement transparent durant toute la course (15e), sauf à un moment où il défendait de manière rugueuse (pour ne pas dire limite) face à la Force-India de Vitantonio Liuzzi.
Interlagos est très certainement une énorme opportunité manquée de la part de Nakajima : qualifié en Q3 (donc dans les dix premiers), il pointait un moment en cinquième position quand au 31e tour, quand il rencontre sur la piste la Toyota par un rookie au nom de Kamui Kobayashi (lui aussi protégé de Toyota). Ce dernier sort des stands et, dans la ligne droite suivant, le pilote Williams tente de le dépasser, sauf que Kobayashi se défend rudement…et surprend son compatriote dans l’action.
Résultat : monoplace chiffonnée et abandon. Ce sera sa dernière opportunité de marquer des points cette saison car le dernier GP, sur le nouveau circuit d’Abu Dhabi, sera conforme aux autres courses : anonyme. Il finira 13e au volant d’une voiture pas très à l’aise sur ce tracé.
Kazuki est le seul pilote qui n’a pas marqué de points parmi ceux qui ont participé à la saison complète, et accessoirement le premier pilote Williams à avoir réussi ceci depuis Alex Zanardi en 1999 (il y'en aura d'autres plus-tard). Triste exploit, la où Rosberg a fini 7e du championnat avec 34,5 points. Toujours pas à son avantage dans l’exercice des qualifications (à deux-trois exceptions près), il n’a pas réussi à se rattraper le lendemain, la faute à des touchettes dans les premiers tours ou parfois à cause des soucis mécaniques.
Notons également que les écarts en 2009 étaient plus que réduites, ce qui compliquait quelque peu la tache de Nakajima…et qui a révélé, voire accentué, ses faiblesses. Son talent n’est pas en cause, mais en avait-il assez pour espérer faire mieux sur cette saison incroyable à certains points ?
En dehors de tout ceci, est-ce que Nakajima avait eu son mot à dire en ce qui concerne les réglages ou les stratégies en course ? Était-il écouté dans l’équipe ? Il serait également intéressant de savoir si il bénéficie de la "même" voiture que Rosberg, à savoir obtenir les améliorations au même moment que son partenaire..
Sa position chez Williams étant de plus en plus intenable, il ne sera plus de l’aventure pour 2010. De toutes manières le retrait total de Toyota en F1 le priverait d’une troisième saison complète dans l’équipe de Grove.
On ne reverra plus Kazuki en Formule-1, bien qu’il ait été pressenti pour aller chez la mystérieuse équipe Stefan GP, qui aurait récupéré les châssis Toyota qui avaient construit des monoplaces « performantes » pour 2010. Evidemment, tout ceci n’est qu’un mirage et le pilote nippon ne roulera pas de toute l’année.
Version audio par Modjo218
K.N
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