Les Kit-Car...des petites bombes très alléchantes qui ont proliféré dans les années 1990 au sein du paysages du rallye. La réglementation impose plusieurs choses : la voiture choisie doit commercialement être produite à 25 000 exemplaires minimum, quelques modifications sur la carrosserie peuvent être autorisées, comme l’élargissement des ailes, l’ajout de spoiler ou d’ailerons. Mécaniquement, la cylindrée du moteur ne doit pas excéder les 2000cc, et seules deux roues motrices sont acceptées. Le règlement explique aussi que ces véhicules peuvent être construits sous forme de kit non-assemblé pour les équipes ou préparateurs. En même temps et de 1993 à 1999, dans le championnat du monde, une coupe 2-Litres ou F2 est crée pour les voitures ayant 2 roues motrices et un moteur 2l atmo'. Dans ces conditions, les Kit-Car, terme véritablement apparu à la fin de l'année 1994, auront largement leur place dans cette "catégorie". On ne s'imaginerait pas que plus-tard, celles-ci (enfin, surtout les modèles francais) feront de l'ombre aux grands du Groupe-A et plus-tard, du WRC.
Dès lors, plusieurs constructeurs sont intéressés (que ça soit pour une participation complète ou partielle au championnat) par cette catégorie. Ces derniers, en plus des préparateurs indépendants voient en effet une parfaite opportunité de s’engager au championnat du monde des Rallyes à un coût relativement réduit.
En 1993 et 1994, ce sont plutôt des machines extrêmement basées sur les modèles de série qui occupaient la scène dans cette petite coupe, avec notamment l’Opel Astra GSI pilotée par Bruno Thiry ou les petites Skoda Favorit. Il faudra attendra l’année 1995 pour voir de véritables Kit-Car suivant (presque) à la lettre les règlements FIA 2-litres.
Un peu d’histoire…
Skoda et le rallye, c’est une tradition qui perdure depuis plus de cinquante ans. Si aujourd’hui, nous connaissons les Fabia R5 qui dominent le plateau en WRC-2 ou encore dans le Championnat Européen de Rallye (ERC), la marque tchèque a déjà fait courir dans les années 1960 des modèles à moteur arrière, notamment avec la 1100MB et, plus tard, la 130RS. Malgré leur conception dépassée et un manque de moyens durant les années 1980, ces voitures remportèrent de nombreuses victoires de classe dans divers rallyes européens ou même au championnat mondial.
Le rachat de la marque par le groupe Volkswagen en 1991 ne change rien pour le département compétition, car la première traction de Skoda, la Favorit, effectue ses débuts dans le rallye. Sa faible cylindrée (1300cc), ses dimensions réduites et son agilité permettent à Skoda de consolider ses victoires de classe. Avec l’introduction de la réglementation F2 en 1994, ses caractéristiques font qu’elle est admissible dans la coupe éponyme, chose que Skoda gagnera dès cette saison avec les pilotes tchèques Emil Triner et Pavel Sibera.
L’année suivante sort la nouvelle (et "véritable") Kit-Car de Skoda (ou presque) : la petite Felicia. Comme sa devancière et malgré sa faible puissance, son agilité et sa petite taille la permet de beaux résultats, même si Peugeot obtiendra le coupe F2. En 1996, c’est Seat qui s’impose avec la Ibiza GTI, après un duel serré jusqu’à la dernière manche. Petite histoire lors du RAC-Rally en Angleterre : l’expérimenté suédois Stig Blomqvist amène sa Felicia à la troisième place absolue (et premier de sa catégorie) ! Certes, aucune équipe officielle n’était présente parmi les 4 roues motrices, mais il faut souligner l’exploit. Ce n’est toutefois pas suffisant pour priver Seat de la coupe Kit-Car / F2.
Une berline en Kit-Car ?
Conscient qu’il faut maintenant une voiture un peu plus ambitieuse pour espérer s’imposer durablement et qu'en plus, les objectifs marketing imposent un nouveau modèle plus "glamour", le département compétition de Skoda, alors dirigé par Pavel Janeba, va construire une toute nouvelle voiture pour la suite. Toutefois, le début de la saison 1997 s’effectuera à nouveau avec les Felicia. Ces dernières s’imposeront en Kit-Car assez nettement au Monte-Carlo (11eme et 12eme au général, avantage pour Emil Triner) avant de disputer ses dernières véritables épreuves mondiales sous les couleurs officielles de Skoda Motorsport (Abandon de Triner en Suède, mais 10eme place pour Sibera en Argentine et en Grèce, à chaque fois premier des Kit-Car.)
Pour ce nouveau modèle, Skoda s’appuie sur la récente Octavia, une berline 4-portes commercialisée au cours de l’année 1996 et basée sur la VW Golf. Sa longueur (4,5 mètres, soit la plus longue Kit-Car jamais construite !), constitue déjà un handicap pour les rallyes même si cela devrait permettre à gagner en stabilité à haute vitesse. Autre souci, le développement n’a, semble-t-il, pas été assez poussé…Malgré tout, des changements mécaniques ont été effectués, avec notamment un moteur 2 litres de 250 chevaux (pratiquement 50 à 100ch de plus que la Felicia). La voiture est présentée au public le 11 juillet et les débuts en rallye s'effectueront en Finlande, à la fin du mois d'aout.
Skoda Motorsport n’engage qu’un seul modèle pour le Rallye de Finlande, dixième manche du championnat du monde des Rallyes (WRC). Ce sera Pavel Sibera qui va assurer les débuts de ce modèle en compétition. Ses compatriotes Emill Triner et Jindrich Stolfa sont également de la partie, mais avec la Felicia (Skoda préférant miser sur la sécurité pour cette épreuve). Cette épreuve finlandaise réserve d’autres nouveautés : Toyota fait débuter la Corolla WRC tandis que Nissan confie la nouvelle Micra Kit-Car à Mark Higgins.
Dès les premières spéciales, Sibera navigue loin au classement général ou en catégorie : en moyenne au-delà de la 30eme place et une vingtaine de places derrière la Seat d’Harri Rovenpera ou la Golf de Tapio Laukkanen. Il renoncera finalement au début de la deuxième journée, la suspension est trop endommagée pour pouvoir continuer. Pendant ce temps sur leurs Felicia, Triner et Stolfa termineront le rallye et finiront respectivement 25eme et 26eme au général (6e et 7e en Kit-Car).
La grande Octavia est de retour pour la douzième manche du WRC sur les pistes asphaltées du Rallye de Sanremo, en Italie où cette-fois, deux voitures sont engagées avec Triner et Sibera. Le dernier cité abandonne d’entrée pour cause de transmission cassé, et le, premier, après avoir été retardé pour les mêmes raisons, renonce lors de la deuxième journée sur une panne moteur…
Ce sera la dernière sortie de l’Octavia cette saison en WRC. Pour le Rallye d’Australie, treizième et avant-dernière épreuve, Skoda préfère sortir les Felicia de leur retraite (Sibera terminera 15e et second des Kit-Car).
L’Octavia fera une autre apparition en Décembre lors du Pražský Rally, épreuve hors-championnat en République-Tchèque. Avec Emil Triner au volant, sa présence aura été aussi courte que décevante, avec une casse de transmission.
A la fin de l’année, Skoda Motorsport est quelque peu dans l’impasse : troisième de la coupe F2 (derrière Seat et Renault), l’Octavia Kit-Car est bien trop longue et encombrante pour espérer quoi que ce soit si on excepte ses soucis de jeunesse…Pourtant, dans les semaines qui suivent, la maison-mère accorde des fonds pour quelque chose de bien plus ambitieux : le projet d’une Octavia WRC, la catégorie-reine du Rallye : avec 4 roues motrices et à moteur turbo…Dès lors, les jours de la version Kit-Car sont déjà comptés et tout développement est arrêté.
Promenade à travers l’Europe
Pour la saison 1998, priorité totale au développement de la future WRC, le programme sportif de Skoda est réduit : Championnat tchèque de rallye, ainsi que quelques manches en ERC et WRC. La puissance est tout de même améliorée en passant à 270 chevaux.
La première apparition de l’Octavia en WRC cette année-là a lieu sur le bitume du Rallye d’Espagne, plus précisément en Catalogne, cinquième manche du championnat mondial. Seul pilote Skoda, Pavel Sibera ne peut rivaliser avec les Seat Ibiza Evo 2, les Peugeot 306 Maxi ou encore les nouvelles Hyundai Coupé et Citroen Xsara Kit-Car et finira par sortir de la route à la fin de la première journée. Idem au Tour de Corse, cette fois-ci le moteur casse. De retour pour la huitième manche en Grèce, Skoda aligne à nouveau qu’une seule Octavia, toujours avec le fidèle Sibera. Dans un rallye réputé cassant et difficile, il réussira à finir 21e au classement général, mais surtout troisième des 2L Kit-Car (quoique sur le papier, comme Skoda n’était pas inscrit à cette coupe en 1998). Certes c’est très loin derrière les Seat de Rovenpera et Gomez, mais les Hyundai et la Nissan Almera de Mark Higgins ont rapidement abandonné, il fallait saisir cette petite opportunité.
Cette 21e place restera le meilleur classement de l’Octavia Kit-Car. En Finlande, Sibera terminera 25e et quatrième de catégorie. En Italie, deux voitures sont présentes pour la première fois de la saison. Outre Sibera, le local Fabio Danti courra l’épreuve. Ce dernier sera le seul à terminer le rallye, à la 26e place au général et huitième de classe.
Pour l’ultime épreuve WRC de la saison en Angleterre, la seule Skoda, pilotée par Sibera, sort de la piste assez tôt. C’est la dernière apparition officielle de l’Octavia F2 au championnat mondial…
Pendant ce temps en ERC, Emil Triner signe quelques résultats intéressants, avec une deuxième place au Rallye de Bohème et de Chypre. Mais le reste du temps, les performances sont discrètes, et la fiabilité reste toujours son talon d’Achille.
A la fin de l’année 1998, Skoda Motorsport est maintenant concentré sur le roulage de la future Octavia WRC. Les versions Kit-Car sont revendus à des clients, bien que l’équipe officielle fait quelques apparitions en ERC avec ce modèle (avec Pavel Sibera, toujours et encore) en 1999 en parallèle des essais de la version WRC. Entre 1999 et 2001, ces voitures étaient présentes de manière régulière en ERC, dans le championnat d’Allemagne, de République-Tchèque et dans divers rallyes est-européens.
L’Octavia version Kit-Car n’aura pas fait mieux que sa devancière, la Felicia. Sa longueur était un désavantage sur les spéciales de rallye, et sa fiabilité loin d’être irréprochable, il faut dire que cette voiture a en quelque sorte été abandonnée au moment où Skoda mettait les moyens sur le futur projet qui allait courir dans la catégorie-reine du rallye.
Caractéristiques voiture:
Produite entre 1997 et 1998 (nombre d'exemplaires inconnue)
Moteur : 2 litres, 4 cylindres atmosphérique
Puissance : 250 à 270 ch à 8000 tr/minute
Boite : Séquentielle 6 rapports
Traction avant
Longueur : 4,5m
Largeur : 1,7m
Poids : 980 kg
Résultats en compétition :
En WRC :
8 participations entre 1997 et 1998 avec l’équipe officielle Skoda Motorsport
Débuts au Rallye de Finlande 1997, dernière participation au Rallye d’Angleterre 1998.
Meilleur résultat général en WRC : 21e en Grèce
Meilleur résultat en catégorie 2L Kit-Car : 3e en Grèce*
Plusieurs participations en European Rally Championship en 1998 et 1999 sous les couleurs officielles (meilleur résultat : 2e à deux reprises)
Pilotes principaux : P. Sibera/P. Gross, E. Triner/M. Hulka.
(* Skoda n'a pas été inscrit à la coupe 2L Kit-Car, sa troisième place de catégorie n'a jamais été vraiment officielle)
Il fallait bien un Didier Auriol pour que le paquebot soit performant en rallye, après l'Octovia reste une bonne voiture spacieuse.