Petit passage assez rapide sur l’unique équipe mexicaine à avoir couru (à ce jour) en Formule 1
Entre les frères Pedro et Riccardo Rodriguez, Moises Solana qui sévissaient dans les années 1960 en F1 et l’apparition de Sergio Perez et d’Esteban Gutierrez de nos jours, il y’avait eu un autre pilote mexicain qui sévissait dans le paddock entre la fin des 70s et le début des années 80. Certes, son palmarès et ses performances ne resteront pas dans les annales de la discipline, mais d’une certaine façon, il aura marqué la fin d’une certaine époque. Certains le considèrent comme l’un des derniers vrais gentlemen-drivers…
Né en 1956 à Mexico, le petit Hector Alonso Rebaque est le fils d’un richissime industriel spécialisé dans la construction et l’architecture, Hector Rebaque Sr., qui lui-même fut pilote dans les années 1950-60.
Il commença le sport-auto assez tardivement, en disputant à l’aube des années 70 plusieurs courses de monoplace et de rallycross dans son pays. A partir de 1972 et grâce au soutien de son père (et de son argent), il part aux USA découvrir les courses d’endurance via l’IMSA GT. Il découvrira également les 24 heures du Mans en 1974 à seulement 18 ans (petit parallèle avec les frères Rodriguez qui ont débuté très tôt également dans la Sarthe) sur une Porsche 911 Carrera RSR.
Ensuite, Rebaque vise le monde des monoplaces. A partir de 1974 et jusqu’en 1976, il alternera entre la Formule Atlantic en Amérique du Nord et la Formule 2 en Europe. Dans tous les cas les résultats ne sont pas terribles. Mais qu’importe : notre pilote veut s’attaquer à la F1 pour 1977 ! Comme va-t-il y parvenir malgré son faible palmarès ? Grace à l’argent familial tout simplement ! En plus des quelques sponsors du pays, Rebaque a le petit soutien de Marlboro, déjà pas mal d’avantages pour se faire embaucher.
Hesketh est intéressé par son profil et l’engage pour un programme de six courses. Le jeune mexicain ne se qualifiera qu’à une seule reprise, en Allemagne où il ne verra pas l’arrivée. Certes, la monoplace britannique n’était pas une foudre de guerre et l’équipe n’était plus que l’ombre d’elle-même depuis le départ de James Hunt fin-75, mais Rebaque a également montré ses limites en se précipitant tôt vers la F1.
Après ceci, le pilote mexicain n’arrive pas à trouver un volant pour 1978 et ce, malgré ses soutiens et l’apport financier du paternel. Ce n’est pas un problème, on va créer sa propre écurie : le Team Rebaque.
Même si la structure a plus ou moins existé auparavant quand le père était aux commandes, notamment en IMSA où il c’était lui qui exploitait la Porsche 911. Mais ici, c’est bien le fils qui est aux commandes pour cette aventure, bien aidé certes par ses partenaires, encore fallait-il convaincre son père de mettre tout l’argent pour son projet.
Si l’équipe est mexicaine, elle se base dans le « monde » de la F1, à savoir en Grande-Bretagne et plus précisément à Royal Leamington Spa, près de Birmingham.
Si l’équipe et Rebaque ont des sponsors et de l’argent, la structure est encore jeune et n’a pas le temps de concevoir sa propre voiture. Ce n’est pas bien grave car Rebaque lui-même va acheter une Lotus 78 - Cosworth ! Oui, la monoplace vice-championne en 1977 et révolutionnaire par le fait qu’il s’agisse de la première F1 à effet de sol a tapé dans l’œil du pilote Mexicain. Il convainc Colin Chapman et le voila désormais avec une monoplace prête à courir et pas mauvaise en plus (5 victoires en 1977 avec Mario Andretti et Gunnar Nilson). Toutefois, son statut de participant privé le privera de tout point gagné en ce qui concerne le classement des constructeurs étant donné qu’il s’agit d’une Lotus…
Malgré tout ceci, le pilote aura du mal à brille, surtout en début de saison. En 16 épreuves, il ne se qualifiera qu’à neuf reprises et son seul fait d’armes reste sa sixième place au GP d’Allemagne, synonyme d’un point au championnat (coté pilote uniquement).
Après cette saison difficile, Rebaque remet le couvert l’année suivante, toujours en se procurant une Lotus, mais cette fois la monoplace n’est d’autre que la 79, toujours à effet de sol et championne en titre ! En plus de ceci, quelques nouveaux sponsors mexicains s’invitent dans la danse. On ne peut qu’espérer une amélioration…
Et si Rebaque a moins de difficultés à se qualifier, les résultats en course ne s’améliorent pas et notre gentleman-driver en herbe peine toujours à se démarquer dans le peloton.
Pourquoi Rebaque galérait-il autant avec ces monoplaces ? Si on excepte le manque d’expérience du pilote à maitriser une F1 à effet de sol (sans compter son talent disons, moindre face à pas mal de ses collègues), le pilote mexicain doit également composer avec des monoplaces arrivées en kit (c’est probablement la même chose pour le moteur Ford-Cosworth) avec des pièces certainement usagées, d’autant plus que pour l’assemblage des machines britanniques, c’est du « débrouille toi seul », le traitement de Goodyear face aux petites structures ou le fait que la FISA apprécie de moins en moins les participants privés font qu’il est difficile pour le mexicain de se faire une place au soleil…Bilan après 10 courses : aucun point marqué, beaucoup d’abandons et un forfait à Monaco pour protester contre le principe du système de préqualification mise en place pour cette épreuve (trop plein d’engagés, les équipes n’ayant pas marqué de point depuis le début de saison devaient y participer alors qu’à la base, cela ne concernaient que celles non-classées de la saison précédente, changement de dernière minute voulue par la FISA…).
Plutôt que de rester comme un « simple » participant privé et de se contenter d’une voiture-poubelle, pourquoi ne pas devenir constructeur ? C’est l’idée de Rebaque au cours de l’année. Bien évidemment, au vu du manque de timing et de personnes expérimentées pour concevoir sa propre monoplace, il va contacter une équipe bien connue aux USA : Penske Racing. Plus précisément, c’est l’ingénieur Geoff Ferris (accompagné de John Barnard) qui aura la charge de concevoir la future monoplace « 100% Rebaque ».
La voiture est conçue dans une antenne britannique de l’équipe américaine, à Poole. Au vu du manque de temps (et de ressources ?), celle-ci sera sensiblement inspirée par ses rivales. Il faut toutefois noter que l’apparition de ces F1 à effet de sol a entrainé une certaine standardisation des formes.
Celle qui reste à ce jour comme l’unique F1 mexicaine est dévoilée à la fin du mois d’aout dans le paddock en marge du GP des Pays-Bas, à Zandvoort. La Rebaque HR100, nom de la voiture (HR comme les initiales du pilote-propriétaire), ressemble fortement à une Lotus 79, mais s’inspire également de la Williams FW07 (une des voitures les plus performantes cette saison) en ce qui concerne les pontons. Coté moteur et pneus, ce sont les inévitables Ford-Cosworth V8 et les Goodyear qui équiperont l’unique Rebaque construite. Toutefois, il faut également noter que s'inspirer de la Lotus 79 est un poil risqué car celle-ci n'est déja plus une grosse référence en 1979, dépassée par d'autres voitures durant cette saison.
Mais la HR100 est loin d’être finie, Rebaque continue d’utiliser la Lotus 79 une toute dernière fois pour le weekend. Il finira septième et dernier à l’issue de la course, meilleur résultat pour le petit mexicain cette saison.
On retrouve la HR100 au GP d’Italie, sur le circuit rapide de Monza, la 13e manche sur les 15 au championnat du monde de F1. Sous un beau soleil de fin d’été, la monoplace va, comme on s’en doutait, connaitre pas mal de soucis de jeunesse, d’autant plus qu’elle est une fois encore loin d’être totalement finie. Après quelques tours bouclés sur l’ensemble des essais, Rebaque signe le 28e et dernier chrono en qualifications, à huit secondes de la Renault de Jean-Pierre Jabouille. Etant donné que la grille est limitée à 24 places, le pilote-patron ne pourra pas participer à la course…
Prochaine étape, le GP du Canada à Montréal. Le weekend va être meilleur qu’à Monza puisque Rebaque parvient à se qualifier pour la course, au 22e rang. Durant l’épreuve, le mexicain se trainera en queue de peloton avant de renoncer sur panne moteur au 26e tour sur les 72 prévus.
Pour le dernier meeting de la saison, sur le tracé américain de Watkins-Glen, pas de miracle : Rebaque a signé un chrono insuffisant pour se placer sur la grille de départ : 26e à 7 secondes de la Williams d’Alan Jones.
Ceci marquera la fin du Team Rebaque, et de la HR100 après trois participations. L’équipe mexicaine serait partante pour retenter l’aventure en 1980, mais les dépenses trop importantes (même avec des sponsors et l’argent du paternel) ainsi que des conflits avec la FISA et la FOCA (association des constructeurs, dirigée par un certain Bernie Ecclestone et défendant notamment les intérêts des GP, mais aussi en défendant les teams britanniques) font que le courageux et ambitieux projet de Rebaque prend fin.
En dehors de ses résultats et de ses apparitions plutôt oubliables. Cette équipe « 100% mexicaine » (ou presque) marquait la fin d’une certaine époque : celle où les gentlemen-drivers/ patrons d’équipes ou les participants privés avaient leur place dans le peloton de F1. Place à la professionnalisation et aux équipes plus sérieuses…
Hector Rebaque restera sans volant jusqu’au milieu de l’année 1980 quand il est contacté par Brabham (dirigée par…Bernie Ecclestone) pour finir la saison. Mais ça, c’est une autre histoire…
Quant à l’unique Rebaque HR100 construite, elle trône désormais dans la résidence de son pilote-propriétaire.
Liens / sources
STATS F1
K.N
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