L'une des meilleures équipes du camp Porsche en GT2 aura vite déchanté dès les essais préliminaires...
D’abord simple préparateur Porsche au milieu des années 1980, l’enseigne fondée par les frères Fabian et Michael Roock s’attaquent à la compétition automobile à partir de 1991, en engageant des Porsche bien évidemment. Très rapidement, Roock Racing va enchainer les succès, que ça soit en Carrera Cup en Allemagne, les 24h de Spa en 1993 puis en ADAC GT…Inutile de dire que la structure devient une des écuries clientes Porsche les plus en vue dans le monde du Grand-Tourisme.
Fin-1995, l’équipe basée à Leverkusen franchit un autre cap et s’attaque au BPR, alors le championnat majeur des GT très en vogue à cette époque. Avec des 911 GT2 engagées, l’équipe se montre immédiatement dans le coup et remporteront plusieurs victoires dans leur catégorie la saison suivante. Cette année-là est d’ailleurs marquée par leur première apparition aux 24h du Mans, Roock Racing remportera assez aisément la classe GT2.
En 1997, le BPR devient la FIA-GT. Le Roock Racing est toujours de la partie, et engage en parallèle des GT2 des 911 GT1 avec peu de réussite. Avec trois voitures en GT2 engagées sur l’année, l’équipe remporte quatre succès, mais malgré les efforts de Claudia Hurtgen, Bruno Eichmann, Ni Amorim ou encore Stéphane Ortelli, il va falloir se contenter de la médaille d’argent derrière l’armada du Viper du Team Oreca.
Aux 24h du Mans également, point de victoire dans la catégorie (on ne parlera pas de la prestation avec la 911 GT1 qui s’est terminée après 40 minutes…) alors qu’une des deux 911 GT2 engagées par Roock aurait dû la gagner après les déboires des Viper et des autres 911 d’autres teams favorites. Mais un souci de turbo privera la structure allemande de victoire. Il va falloir se contenter de la seconde et troisième place dans cette catégorie GT2, à seulement un tour du vainqueur…Reste un succès aux 24h de Daytona en début d’année avec surtout une quatrième place au finale.
Pour 1998, le programme est inchangé. La FIA-GT est toujours au programme du Roock Racing et les 24h du Mans sont toujours d’actualité avec trois voitures invitées pour cette épreuve. Bien évidemment, les 911 GT2 seront toujours engagées par l’équipe allemande. Mais contrairement aux autres équipes clientes Porsche qui développent/préparent par leurs propres moyens du bord, ou bénéficient du soutien de la marque ou encore en faisant appel à des préparateurs externes, Roock Racing va elle-même améliorer leur 911 GT2 à leur propre manière.
En comparaison avec les autres 911 GT2 des autres équipes, celles venant de chez Roock verront leur carrosserie et les ailes élargies ainsi que l'aileron arrière agrandi en plus de l'ajout d'une prise d'air entre la portière et les roues arrière. Le poids est désormais nettement inférieur à ceux des autres 911 GT2 (minimum 1060 kg, contre plus de 1100 kg pour les autres) et la boite de vitesses est à commande séquentielle développée par l’équipe et par les préparateurs britanniques Gemini. Autre particularité par rapport aux autres Porsche : l’équipe se passe de l’ABS.
Coté moteur, le Flat 6 en ligne turbocompressé subit lui aussi une dose de vitamines : la puissance dépasse les 500 chevaux et aurait également bénéficié d’une légère augmentation de la cylindrée (de 3,6l à 3,8 selon certaines sources, difficile de l’affirmer entièrement).
Enfin, après avoir été équipée de pneus Michelin depuis 1996, Roock Racing choisira les Pirelli pour cette saison, incluant le Mans. Est-ce que toutes ces profondes modifications permettront à celle qui est la meilleure représentante des Porsche GT2 de lutter face aux Viper Oreca qui ont-elles aussi, progressées ?
Dès la première manche de la FIA-GT sur le circuit de l’Oschersleben, les 911 GT2 de chez Roock se montrent véloces face aux autres GT2 (incluant les autres Porsche ou la Marcos), du moins sur un tour lancé car les Viper seront pratiquement sans concurrence pendant l’épreuve malgré la belle prestation du duo Hurtgen-Ortelli. Pire, la fiabilité est mise à mal sur les voitures préparées par l’équipe allemande : le moteur, la boite de vitesses seront les principales faiblesses. Sur les trois voitures, une (avec Hurtgen et Ortelli) renoncera en cours de route et les deux autres finiront très loin derrière (et hors des six premiers en GT2, donc aucun point récolté)…dont une qui va être disqualifiée après la course: aileron arrière un peu trop grand par rapport à la réglementation.
Après cette première déception, direction les préqualifications des 24h du Mans qui se déroulent début-mai, un moins avant la grande épreuve. Séance cruciale pour savoir qui participera à la course suite à un nombre important d’engagés et d’invités sur cette future 66e édition. Au vu de la liste des inscrits, la concurrence va être très rude, quel que soit la catégorie…
Chez Roock, pas de changement majeur en ce qui concerne les voitures et comme dit précédemment, il y’en a bien trois engagées par l’équipe. Il y’aura forcément quelques nouveautés en ce qui concerne les équipages avec le retour de certains venus exclusivement pour cette course et quelques absences, dont celle de Stéphane Ortelli parti chez l’équipe officielle Porsche pour piloter la 911 GT1. Jetons un œil :
La 64 est une des voitures de pointes de chez Roock, avec les pilotes habituels du team en FIA-GT, à savoir Bruno Eichmann et Claudia Hurtgen. Pas de troisième pilote annoncé pour ces préqualifs.
La 65 est la seconde voiture de pointe. Les seconds de l’édition 97 des 24h en GT2, André Ahrle et Andy Pilgrim qui font leur retour, seront épaulés par l’anglais Robert Nearn (il semblerait qu’il n’était pas présent à cette séance-là). Elle est cette-fois équipée d'une boite traditionnelle.
Enfin, la 66 sera pilotée par deux gentlemen-drivers, John Robinson et Hugh Price. Pilotant pour l’équipe allemande en FIA-GT cette saison, Sascha Maassen les accompagnera. Il sera d’ailleurs le seul présent durant cette séance d’essais préliminaires…Notons que cette Porsche ne dispose que partiellement des modifications réalisées par Roock d'après les clichés disponibles.
Du coté des autres GT2 inscrites à cette séance éliminatoire, on note bien sur la présence des Viper Oreca et celles de chez Chamberlain. Dans le camp Porsche, pas mal de 911 GT2 sont venues s’inviter à la fête et il ne faudra pas sous-estimer certaines structures comme le Konrad Motorsport, Larbre Compétition ou encore du Elf-Haberthur Racing (vainqueurs de l’édition passée). Quelques curiosités : deux Saleen Mustang sont engagées par Cirtek Motorsport et une Helem V6 ( une Renault Spider génétiquement modifiée) sont également présentes.
Sur les 59 voitures présentes au préqualifs’, 22 sont des GT2. Deux séances sont organisées en coupant le plateau en deux. La première session (durant la matinée du 3 mai) voit la numéro 65 se présenter sur la piste.
C’était peut-être prévisible, les profondes modifications manquent encore de développement et la mise au point est laborieuse. La 911 fera juste 13 boucles au total avant que le moteur casse. Résultat : un tout petit meilleur chrono en 4 :14 :45, à plus de cinq secondes des meilleurs Porsche et à plus de 13s de la Viper/ Oreca, meilleur temps en GT2 parmi cette première session. Etant donné qu’elle a réalisé l’un des moins bons temps dans la catégorie, la Porsche numéro 65 du Roock Racing échoue à franchir les préqualifications, avec un des deux équipages de pointe de surcroit !
Deuxième séance de ces préqualifs (même jour, dans l’après-midi), la 64 et la 66 vont cette-fois tenter de sauver les meubles. Dix GT2 sont présentes sur cette séance au total. Le résultat va être plus que mitigé dans le camp du Roock Racing. Pour la 64, pas de soucis à signaler, la voiture effectue plus de 30 tours sur la piste de 13km et Bruno Eichmann signe un temps en 4 :03 :925, derrière les deux intouchables Viper/Oreca et la 911 du Larbre Compétition. C’est toutefois largement suffisant pour franchir le cap des préqualifs’ et ce temps prouve également que la 911 GT2 modifiée par l’équipe a un certain potentiel…
Pour la 66 en revanche, l’histoire est différente. La voiture ne fera que trois petits tours durant cette séance avec un meilleur temps en…5 minutes !! Comme sur la 65, le moteur a rendu l'âme très tôt durant cette séance. Bien évidemment, cette Porsche n’est pas préqualifiée.
Résumons un peu cette séance : Roock Racing, l’équipe qui a remporté la catégorie GT2 en 1996, celle qui a également fini sur le podium avec ses deux voitures l’année suivante dans la même classe, n’aura qu’une seule voiture engagée pour l’édition 1998 sur les trois inscrites initialement. Une jolie claque ou retour à la dure réalité pour l’équipe allemande qui était surement venue un peu trop confiante avec des 911 GT2 « faites maison » encore perfectible, notamment sur le plan de la fiabilité. Il va falloir trouver le moyen de se débrouiller comment s’imposer dans la catégorie avec une seule voiture et surtout, en modifiant très certainement l’équipage de la 64…
Toutefois, on apprend quelques temps plus-tard que la quatrième Viper de chez Oreca ainsi que de la seule Saleen de chez Cirtek (toutes deux en GT2 pour rappel) qui a réussi à se préqualifier déclarent forfait pour les 24 Heures. Ce qui veut dire que deux voitures de la classe GT2 seront repéchées, à savoir la Helem V6 et surtout, la Porsche #65 du Roock Racing. Un moindre mal…
Notons enfin que Cirtek Motorsport a justement contacté Roock Racing pour caser leurs pilotes présents sur la Saleen sur l’une de leurs deux voitures. Peut-être y’a-t-il eu un arrangement entre les deux équipes dans l’histoire, en tout cas le lineup est profondément revu avec dans la 64, Claudia Hurtgen Robert Nearn et Michel Ligonnet (ex-Cirtek) et dans la 65, André Ahrle, Rob Schirle et Dave Warnock (ex-Cirtek pour les deux derniers cités). Sont donc sacrifiés Bruno Eichmann et Andy Pilgrim pour cette 66e édition du Mans. Coté voiture, les pneus Yokohama prennent le relais des Pirelli avec effet immédiat (incluant le programme FIA GT) et si la 64 reste (presque) inchangée, la 65 sera un peu plus « classique » en revenant à une boite de vitesses traditionnelle. L’histoire de l’équipe sur cette épreuve sera (un peu) plus heureuse, mais c’est une autre histoire…
Liens / sources:
Guide 24h du Mans 1998
Circuit Magazine, spécial le Mans 98
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