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Photo du rédacteurGoodstone

Venturi en F1 (1992)

Une courte et oubliable aventure de la part de Venturi alors que celle-ci n'était pas au mieux de sa forme...




Quand on évoque Venturi en compétition, on pense assez rapidement à ses participations récentes en Formule E (aujourd’hui l’équipe est reprise par Maserati) ou encore aux 400 ou 600 GT qui avaient couru aux 24h du Mans dans les années 1990. Mais le petit constructeur français (à l’époque) s’est également aventuré en Formule-1, brièvement certes.


Pour savoir comment Venturi s’est retrouvée dans cette discipline, il faut également évoquer une écurie française en grande difficulté : Larrousse F1. Cette dernière se trouve en grosses difficultés financières à l’issue de la saison 1991 (en exploitant des châssis Lola) en absence de partenaire majeur ou d’un gros investisseur, Espo s’est retiré en début d’année touché par la crise asiatique…Pire, l’équipe basée à Signes (près du Castellet) est placée en redressement judiciaire à cette période en dépit d’une tentative de fusion avec une autre structure agonisante, AGS.


Performances moyennes, fiabilité plus que problématique, pas d'argent, deux points marqués et une 11e place au classement pour Larrousse/Lola en 1991 (©?)


C’est là qu’intervient Venturi, quoi de mieux pour le petit constructeur de Couëron (près de Nantes) que de s’aventurer en F1 ? Il faut dire qu’à l’époque, celle-ci, propriété du groupe Primwest, plus précisément de Didier Primat (issue de la richissime famille Primat-Schlumberger), Venturi voyait les choses en grand en déménageant justement à Couëron. La marque a de plus en plus des vues en compétition automobile, d’abord en lançant un projet (mort-né) pour le Paris-Dakar, puis la Formule-1 sans compter un autre programme de compétition-client via le GT…mais on y reviendra plus-tard…


C'était pas la grande joie chez Venturi au début des 90s,. En fait, c'était pas la joie pour les (petits) constructeurs de voitures sportives à cette époque


En fin d’année, l’accord est conclu entre Larrousse et Venturi. Ce dernier rachète à 65% l’écurie fondée par Gérard Larrousse et débourse plus de 28 millions de francs dans l’affaire. Elle s’engage également à soutenir financièrement l’entité. Le groupe japonais Doi (présent depuis la saison précédente) contribue également dans l’affaire.


Lors du GP de France 1991, Venturi apparaissait déja sur les flancs des Larrousse à l'occasion de cette épreuve. L'accord est par la suite maintenu pour la fin de saison... (©?)

Parallèlement à ceci, une nouvelle antenne sera créée en Grande-Bretagne. Il s’agit en fait du bureau d’études du designer Robin Herd (ex-March, ex-Fondmetal). Ce qui veut dire que Venturi/Larrousse va elle-même concevoir son propre châssis pour la saison 1992 contrairement aux autres années où c’était Lola qui se chargeait de tout ceci. Enfin, la base « historique » de Larrousse, à Signes, reste toujours opérationnelle : c’est ici que seront préparées les monoplaces.



Un mariage plutôt intéressant et ambitieux. Toutefois, on se demande pourquoi Venturi s’aventure dans ce monde de requins, considérant que le petit constructeur lui-même n’a pas de grands moyens et souffre surtout de pertes financières en partie liées aux ventes stagnantes de ses modèles sportives (notamment avec le coupé 210) et surtout, à cause de de la crise économique du début des 90s qui mettent à mal le petit artisan de Couëron.


Autre souci, le programme F1 avec Larrousse provoque pas mal de désaccords au sein même de chez Venturi. Sachant que la marque connait elle aussi des difficultés financières, pourquoi dépenser davantage dans un programme très très couteux et en association avec une modeste équipe de F1 ? Et est-ce que cela va accentuer les difficultés financières de Venturi à terme ?


Présentation de l'équipe à Pantin en début d'année 1992. La Venturi LC92 (LC pour "Larrousse & Camels" du temps ou ils avaient fondé la structure) a une livrée très (trop?) "Larrousse" (©P. Daubrosse)

Revenons à nos moutons. La monoplace de l’association Venturi/Larrousse, la LC92, est inédite en comparaison avec les anciens châssis provenant de chez Lola…Cela dit, quelques pièces proviennent encore du constructeur britannique. Hormis ceci, la machine est de facture classique et bien rondouillarde en plus d’etre assez large. Normal, il faut également loger le V12 Lamborghini sous le capot. Un bloc qui n’est pas étranger au sein de chez Larrousse puisqu’il propulsait déjà les monoplaces de l’équipe en 1989 et 1990 avant d’utiliser le V8 Ford-Cosworth. Voila un petit retour aux sources…


©Zoran B

Coté pilotes, exit Aguri Suzuki (parti chez Footwork) et Eric Bernard (blessé depuis l’accident aux essais du GP du Japon fin-91), place à deux nouveaux pilotes avec tout d’abord le champion de la F3000 nippon, Ukyo Katayama qui apporte également avec lui plusieurs sponsors comme Cabin, Central Park ou encore Zent.


A ses côtés, Bertrand Gachot prendra le volant de la seconde LC92. Il avait couru une partie de la saison 91 chez Jordan avant sa condamnation pour agression sur un chauffeur de taxi, et a disputé la dernière manche chez Larrousse justement. Le voila qui retrouve une nouvelle chance en F1 après ses affaires l’année précédente. A l’instar de Katayama, le franco-belgo-luxembourgeois apporte également quelques sponsors nippons (grâce à son succès aux 24h du Mans en 91).


©?

Un duo de pilotes plutôt intéressant, une association qui promet certaines belles choses et une machine saine…Reste la question des moyens financiers car même avec le mariage franco-français, car oui, cela reste toujours la grande interrogation et le point faible de l’équipe à ce sujet. On ne peut qu’espérer une saison au moins convenable dans le peloton…


A vrai dire, la Venturi LC92 est l’exemple-type de la monoplace bien conçue et globalement compétitive, mais qui souffre d’un manque de développement au fil de la saison. Les pilotes arrivent sans problème à se qualifier (bien que Katayama a loupé le coche à deux reprises, à Barcelone et à Monaco) et se placent globalement aux alentours de la 14e position, notamment pour Gachot. Sur les tracés rapides, la LC92 parvenait un peu à se démarquer grâce à la cavalerie de son V12 Lambo, mais cela n’a toutefois pas suffi et un seul point n’a été marqué durant la saison 1992, avec la sixième place de Gachot à Monaco.



Outre le manque de développement au cours de l’année, ce sont des gros problèmes de fiabilités qui ont fait reculer l’équipe dans la hiérarchie en fin de saison. Les problèmes concernent le moteur Lamborghini et la boite de vitesses.


Plus que la fiabilité, les pilotes sont également coupables de plusieurs sorties de piste, que ça soit en essais comme en course, et peuvent parfois couter très cher au budget de l’équipe. Un exemple d’incident couteux dans tous les sens du terme ? A Suzuka où les deux pilotes ont voulu faire un remake ultra cheap de l’incident Prost-Senna en 1989 :


Déjà qu'ils se sont accrochés à Montréal, les voila qu'ils récidivent au Japon...


Après une 11e place au classement des équipes, l’association entre Larrousse et Venturi prend fin après une seule saison. En fait, le petit constructeur a même annoncé l’arrêt du partenariat (en revendant ses parts) vers la fin de l’été alors que la saison n’est pas terminée. Celle-ci sort encore plus affaiblie qu’en 1991 entre la mévente de ses voitures de sport, la crise financière et la perte de 30 milions de francs en été 92…Le couteux programme F1 est logiquement jeté à la poubelle, d’autant qu’il faut également diminuer les effectifs chez Venturi. Fin d’une courte histoire qui n’aurait jamais du commencer au regard de ses nombreuses difficultés initiales.


Katayama, Estoril 92 (©Louis Lau)

Larrousse a trouvé un nouveau commanditaire pour la fin de saison et pour les années suivantes. Il s’agit d’un groupe de placement immobilier originaire des Etats-Unis : Comstock. L’avenir devrait être assuré à terme…enfin c’est avant qu’on découvre quelques semaines après que son dirigeant est en fait, recherché par Interpol pour avoir commandité plusieurs crimes ! On peut dire que Gérard Larrousse s’attire une certaine poisse pour trouver des investisseurs afin de survivre….Elle sera tout de meme présente en 1993, mais sans Katayama (qui emmène avec lui presque tous ses partenaires chez Tyrrell) ni Gachot.


Gachot à Silverstone (©Richard Woods)


Quant à Venturi, à l’agonie, elle sera pratiquement sauvée grâce à la mise en place d’une série mettant en scène des 400 GT réservées aux gentlemen-drivers et initiée/dirigée par un jeune entrepreneur (et directeur du service compétition de la marque) ambitieux au nom de Stéphane Ratel. La première année de ce trophée, en 1992 justement, est un gros succès. Et si Venturi s’était uniquement focalisé sur ceci au lieu de se disperser en F1 ?


Quelques fulgurances pour le petit Katayama en qualifications. Mais hormis ceci, trop d'erreurs sur la piste...(©Jean-Michel Boileau?)


Liens/sources:











Alors que le programme F1 est sur le point de se terminer, une série mettant en scène des 400 GT préparées par Venturi fonctionne bien: plus de 50 voitures au départ sur cette course à Magny-Cours fin-1992! Cela donnera des idées à la marque...(©archives Venturi)









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1 Comment


sylvain
Dec 23, 2022

Merci pour cet article toujours bien documenté. Larrousse, Lamborghini, Venturi ... ça avait pourtant de l'allure sur le papier !

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