Une version coupé de l’élégante berline XJ sortie en 1968 ? Jaguar avait pensé à ceci, mais entre des difficultés de mise au point et un manque de trésorerie, il faudra attendre 1975 pour voir cette XJC dans les catalogues de la marque. Une très bonne période pour lancer ce coupé plutôt sympathique : la crise pétrolière a fait son apparition fin-73 . Ajoutez cela à des soucis de construction, de fiabilité ainsi que la concurrence de la XJS et le succès n’est pas présent…La carrière de cette Jaguar prend fin en 1977 (elle sera encore disponible au catalogue en 1978).
A part ça, rien ne la destinait à se promener dans le monde de la compétition auto… Vraiment ? British Leyland, le groupe alors propriétaire de Jaguar, voit bien une occasion de promouvoir la XJC à travers la compétition et dans le même temps, permettre à la marque de faire son grand retour officiel en sport-auto après les succès et apparitions dans les années 1950/milieu des années 60. Mais pas question d’entamer ce programme sportif tout seul. Il faut l’aide d’un préparateur et d’une équipe externe et qui est expérimentée. Ce sera Broadspeed qui aura la charge de développer la XJC qui doit courir dans le monde du Touring Car.
Cette entreprise basée à Birmingham n’est pas inconnue, elle a déjà préparé avec succès plusieurs voitures qui ont brillé dans le championnat britannique de tourisme auparavant, avec notamment des Ford Escort, des Austin Mini ou encore la Triumph Dolomite. Notons que ces deux dernières marquent sont issues du groupe British Leyland, il semble logique que ce dernier passe rapidement un accord avec la structure fondée par Ralph Broad à partir de 1975.
Pas mal de travail sera réalisé. Tous les équipements de confort sont supprimés pour enlever au maximum le poids (encore que le tableau de bord en noyer est conservé, de même concernant les vitres électriques !!), la XJC est également un peu élargie en améliorant l’aero et l’avant se retrouve affublé d’un spoiler assez imposant. L’échappement a également été modifié en profondeur et enfin, les suspensions, la boite de vitesses (tous issus de la XJC de série) et les freins ont été renforcés. Avec son look d’enfer, cette XJC de compétition, la XJ12C, impressionne et semble prête à manger ses adversaires sur la piste. Notons qu’avec tout ceci, la bête pèse 1350 kg. C’est certes bien plus lourd que les autres machines en tourisme, mais c’est tout de même près de 500kg de moins que la version de série !
Et le moteur ? Broadspeed choisit le V12 5,3l et le modifie sérieusement : la cylindrée augmente légèrement (5,4l) de même pour la puissance. Tout ceci donne plus de 500 chevaux (289 de base) de pure intensité.
Homologuée en Groupe 2, classe pour voitures proche de la série avec un minium 1000 exemplaires de série construits, la XJC12 est intensément développée au cours de l’année 1975 et est présentée pour la première fois en mars 1976. Objectif : participer à la saison du championnat européen de tourisme, l’ETCC. Problème : l’homologation n’est effective qu’à partir du 1er avril, Jaguar et Broadspeed vont donc manquer la première manche, à Monza. Elle est inscrite dans la « Division 5 », catégorie où les voitures ayant une cylindrée supérieure à 3 litres sont admises.
En attendant, les essais commencent et s’intensifient. Et les premiers soucis apparaissent, la mise au point est laborieuse, la fiabilité plus que problématique…et les débuts en compétition se font plus qu’attendre. En fait, il faut attendre septembre pour la voir débuter en ETCC, dans le cadre du Tourist Trophy à Silverstone, 8e manche de la saison 1976 d’ETCC.
Toujours sous la houlette de Broadspeed, mais engagée sous les couleurs et le nom de British Leyland, la XJ12C sera pilotée par deux pointures en la personne de Derek Bell et d’Andy Rouse (multiple vainqueur du championnat britannique de tourisme). Est-ce que la grosse Jaguar arrivera à tirer son épingle du jeu face aux BMW 3.0, aux Alfa GTV, aux Ford Capri, à quelques Mazda RX-3 ou encore des Triumph Dolomite Sprint (engagées par British Leyland et Broadspeed également) ? La réponse est oui : pour sa première sortie, la Jaguar partira en pole position, à presque deux secondes devant la BMW 3.0 du Luigi Racing !! Notons que Rouse laissera sa place à David Hobbs pour la course, il pilotera la Triumph Dolomite.
La course justement ? Eh bien, Derek Bell arrivera à la maintenir en tête pendant le début de l’épreuve avant de connaitre divers problèmes. La voiture consomme énormément et bouffe à la fois ses pneus ou ses freins. Des soucis avec le moteur et la transmission sont décelés. Finalement, la Jag’ abandonnera au tiers de la course après avoir perdu une roue. Maintenant, on se concentre pour 1977…
Durant l’hiver, la XJ12C continue d’être développée et améliorée. Deux nouvelles voitures sont construites avec le spoiler à l’avant est modifié, la carrosserie un peu modifiée et un aileron arrière est ajouté. Plus encore, la largeur des pneus Dunlop est élargie et Broadspeed planche également sur l’intégration d’un carter sec sous le moteur (qui voit sa puissance augmenter et passer à 560 ch) histoire de fiabiliser l’ensemble. Mais celui-ci ne sera pas encore opérationnel pour le début de saison.
Deux Jaguar seront engagées à l’année, l’une pour le duo Bell/Rouse et l’autre pour John Fitzpatrick et Tim Schenken…Bref, des équipages et des pilotes très solides en somme !
Dès la première manche, les 4 heures de Monza, les Jaguar rugissent haut et fort : la XJ12C de Fitzpatrick/Schenken décroche la pole, mais celle de Bell/Rouse casse son moteur durant les qualifs’ et n’a pas effectuée de chrono, signifiant donc une non-qualification pure et simple. En course, la seule Jag’ présente sur la grille maintient le cap en tête…avant que le joint de culasse casse après une grosse heure. Dommage !
Le souci est que les courses s’enchaînent et se ressemblent, les voitures occupent toujours le haut du pavé sur la grille de départ, mais renoncent toujours au premier tiers de l’épreuve. La transmission l’échappement, le moteur ou presque tous les autres éléments mécaniques sont fragiles. Après une déroute au Salzburgring, manche suivante, l’équipe préfère déclarer forfait au Mugello et à Enna-Pergusa…
Arrive la manche sur le circuit tchécoslovaque de Brno et miracle : une des deux voitures a réussi à franchir la ligne d’arrivée et à tenir les 3h30 de l’épreuve. Certes la Jag’ de Fitzpatrick/Schenken termine à une lointaine 16e place finale (après s’être élancé second au départ) après un souci en cours de route, mais y’a du progrès ! Et les courses suivantes ? Une magnifique deuxième place viendra couronner la performance de Derek Bell & Andy Rouse sur le fameux tracé du Nurburgring Nordschleife pour l’épreuve de 4 heures. C’est d’ailleurs la seule voiture à terminer dans le même tour que le vainqueur, une BMW 3.0 CSL préparée par Alpina.
La saison est-elle enfin lancée chez Jaguar & Broadspeed ? Eh bien, hormis ceci, les XJ12C ne collectionneront que des désillusions. À Zandvoort où l’implantation du carter sec fait enfin son apparition sur une des voitures (souci d’homologation apparemment), les deux machines britanniques renoncent sur soucis mécaniques. Pour le Tourist Trophy sur le tracé de Silverstone, les voitures occupent la première ligne, mais Fitzpatrick/Schenken renonceront dès le deuxième tour tandis que Bell/Rouse se battaient pour la gagne face à la BMW Alpina…mais l’équipage sortira de la piste à moins de dix tours du but, ce qui n’empêchera pas le duo anglais d’être classé 4e !
A Zolder, les deux Jag’ disparaissent après trois petits tours pour un souci de boite pour l’une et de soupape pour l’autre. Elles étaient 2e et 3e au départ, la lose…
Juste après ce meeting belge, British Leyland décide d’arrêter le programme de la XJ12C avec effet immédiat alors qu’il restait encore deux manches avant la fin de saison en ETCC. Les mauvais résultats combinés aux gros soucis financiers du groupe ont contribué à ce retrait. Dommage car la Jaguar était réellement performante en dépit de ses soucis de poids et de dimensions et pouvait aisément viser la gagne si la direction était plus patiente et la mise au point un peu moins laborieuse…ou alors si la durée des épreuves ne dépassaient pas la demi-heure.
En parallèle à ceci, une XJ12C (un des quatre exemplaires construits) a également fait des apparitions dans la série Chapeau melon et bottes de cuir, la seconde série diffusée entre 1976 et ’77, avec le V12 moins puissant et sous une robe plus « civilisée ». Aujourd’hui les machines de compétition courent de temps en temps dans des meetings historiques, certaines répliques ont été également crées.
Fiche auto
Moteur : V12 5416cc
Aspiration : atmosphérique
Implantation : à l’avant
Puissance : 560 chevaux à 8000 tr/min
Voiture : basée sur la XJC de série
Boite de vitesses : manuelle 4 vitesses
Transmission : à l’arrière
Poids : 1350 kg
Pneus : Dunlop
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